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Commentaire sur le Psaume 84

  1. Au Maître-Chantre. Avec l’instrument de Gath. Psaume pour les enfants de Coré.
  1. Combien j’aime tes demeures, Éternel des armées!
  2. Mon âme languit, elle se pâme, après les parvis de l’Éternel ; ma chair et mon cœur crient après le Dieu vivant.
  3. Le passereau même trouve sa maison, et l’hirondelle son nid où elle met ses petits… ô tes autels, Éternel des armées, mon Roi et mon Dieu!
  1. Heureux ceux qui habitent ta maison ; ils te loueront continuellement. (Sélah).
  2. Heureux les hommes dont la force est en toi ; il y a des chemins dans leur cœur ;
  3. en traversant la vallée des pleurs, ils en font un lieu arrosé ; la pluie aussi la couvre de bénédictions.
  4. Ils vont de force en force et paraissent devant Dieu en Sion.
  1. Éternel, Dieu des armées, écoute ma prière! Dieu de Jacob, prête l’oreille! (Sélah).
  2. Ô Dieu! notre bouclier, regarde! Considère la face de ton oint!
  3. Car mieux vaut un jour dans tes parvis que mille ailleurs ; j’aime mieux me tenir à la porte de la maison de mon Dieu que d’habiter les tentes de la méchanceté ;
  4. car l’Éternel Dieu est un soleil et un bouclier ; l’Éternel donne la grâce et la gloire ; il ne refuse aucun bien à ceux qui marchent dans la perfection.
  5. Éternel des armées! heureux l’homme qui se confie en toi!

Ce Psaume, qui exprime d’une manière si touchante la souffrance d’une âme pieuse lorsqu’elle se trouve privée du culte public, paraît avoir été composé, comme les Ps 42 et 43, par David, pendant qu’il était en fuite à cause de la révolte d’Absalon[1]. Il a aussi de grands rapports avec le Ps 63, qui dut le jour à des circonstances analogues. Les explications que nous avons données sur ces Psaumes s’appliqueront donc aussi à celui-ci, ce qui nous dispense de les reproduire. Cela posé, nous pouvons très bien admettre que ce Psaume avait aussi un caractère prophétique et qu’il exprime, comme le pense le rabbin Kimchi, les sentiments de l’Israël de nos jours soupirant après la restauration de ses privilèges et de son temple.

On peut distinguer trois strophes. La première exprime la tristesse de l’exilé (2-4). La seconde dépeint le bonheur que le fidèle trouve dans le service divin et en général dans la communion avec Dieu (5-8). La troisième est une prière dans laquelle le psalmiste demande à Dieu de mettre fin à son épreuve (9-13).

Verset 1. Au Maître-Chantre. Avec l’instrument de Gath. Psaume pour les enfants de Coré.

Avec l’instrument de Gath, voyez Ps 8. — Pour les enfants de Coré, voyez l’introduction au Ps 42.

Verset 2. Combien j’aime tes demeures, Éternel des armées!

Littéralement : Combien tes demeures sont aimées. Pour les fidèles, le service divin, les sacrements et les autres moyens de grâce sont, comme le dit très bien Calvin, une échelle par laquelle ils s’élèvent à Dieu. — L’expression tes demeures a été expliquée à l’occasion de Ps 43.3.

Verset 3. Mon âme languit, elle se pâme, après les parvis de l’Éternel ; ma chair et mon cœur crient après le Dieu vivant.

En hébreu le premier verbe est très énergique, c’est celui qui est employé Ps 17.12 pour exprimer l’avidité d’un animal carnassier. Il est aussi employé Gn 31.30 lorsqu’il est question de l’ennui de Jacob après la maison paternelle. Le second verbe signifie proprement : se consumer (Ps 69.4). — Le verbe du troisième hémistiche (ranan) s’emploie ordinairement lorsqu’il s’agit de cris de joie, aussi Hengstenberg et d’autres veulent lui conserver ici cette signification, et pensent que le psalmiste a pu s’en servir parce qu’il se représentait d’avance très vivement le bonheur qu’il éprouverait quand ses vœux seraient exaucés ; mais le contexte nous porte plutôt à prendre ce verbe dans un sens plus général, et c’est ce que font aussi les versions anglaise et hollandaise. — Sur l’expression si belle et si profonde : Dieu vivant, voyez Ps 42.3.

Verset 4. Le passereau même trouve sa maison, et l’hirondelle son nid où elle met ses petits… ô tes autels, Éternel des armées, mon Roi et mon Dieu!

Ce verset présente une difficulté à cause de sa concision. En hébreu les mots tes autels suivent immédiatement les deux premiers hémistiches sans être précédés d’aucun verbe. Si l’on veut les y rattacher directement on peut traduire : savoir, tes autels, etc., ou bien, près de tes autels. Mais ces traductions adoptées par les Septante, les versions anglaise et hollandaise, Hengstenberg, Delitzsch et autres, donnent l’idée un peu étrange que les oiseaux venaient construire leurs nids dans le sanctuaire. Hengstenberg croit lever la difficulté en supposant que le psalmiste, passant immédiatement de l’image à la chose figurée, s’est représenté lui-même en parlant du passereau et de l’hirondelle, de même qu’il se compare à un oiseau dans Ps 11.1, et Ps 56 (le titre). Mais il nous paraît plus simple d’admettre avec Calvin, et parmi les modernes Stier et Hupfeld, que le psalmiste s’est interrompu à la fin du second hémistiche et qu’il faut suppléer quelque chose. L’idée qu’il a voulu exprimer est celle-ci : Le fidèle recherche la maison de son Dieu avec le même empressement que l’oiseau son nid ; nulle part ailleurs il ne peut se sentir parfaitement en sécurité et heureux. — David parle des autels, parce que c’était là qu’avait lieu la partie la plus solennelle du culte, les sacrifices et l’offrande du parfum.

Verset 5. Heureux ceux qui habitent ta maison ; ils te loueront continuellement. (Sélah).

Éternel des armées. Voyez l’explication de Ps 24.10. La pensée du premier hémistiche se trouve également dans Ps 27.4, 122.1. Cependant cette habitation dans la maison de Dieu ne doit pas être entendue d’une manière trop restreinte ; il ne s’agit pas seulement de la fréquentation du service divin, mais d’une consécration de toute la vie à Dieu, d’une communion habituelle avec lui. — L’adverbe de temps qui termine ce verset signifie ordinairement encore, de nouveau, et Hengstenberg et Delitzsch lui conservent ce sens ici, supposant que le psalmiste a voulu dire que les fidèles (ceux qui sont habituellement en communion avec Dieu) peuvent, lorsqu’ils se trouvent dans l’épreuve, avoir une espérance fondée d’en être délivrés et de recouvrer les jouissances spirituelles dont ils sont privés pour un temps. C’est ainsi que le psalmiste affligé s’écrie au Ps 42.6 : Je le célébrerai encore. Cependant il est plus simple de s’en tenir à la traduction de la plupart des versions ; elle est également fondée, car le mot hébreu se rattache à un verbe qui exprime l’idée de retour, de répétition.

Verset 6. Heureux les hommes dont la force est en toi ; il y a des chemins dans leur cœur ;

Avec le premier hémistiche on peut comparer Ps 27.1, 33.6. « Ce n’est pas peu de chose que de se reposer sur Dieu entièrement » (Calvin). — Il est assez difficile de déterminer le sens du second hémistiche. En hébreu il ne se compose que de deux mots dont la traduction littérale serait : chemins dans leur cœur. Si l’on prend le mot chemins au sens propre, le contexte indique que le psalmiste a voulu parler de ceux qui mènent à la maison de Dieu et qu’il a voulu dire que les hommes pieux aiment à penser à ces chemins-là et à y marcher ; c’est ainsi que notre verset est expliqué par le rabbin Abenesra, et parmi les modernes par Delitzsch. D’autres préfèrent le sens figuré et pensent que David a voulu dire que les fidèles suivent les chemins agréables à Dieu, le chemin de l’obéissance et de la droiture (ainsi le rabbin Kimchi, Hengstenberg, etc.). Nous pensons aussi qu’il faut donner à chemins un sens moral, mais il nous paraît que le second hémistiche de notre verset doit aussi bien que le second hémistiche du verset précédent renfermer non pas un caractère des fidèles, mais une conséquence du fait exprimé dans le premier hémistiche. C’est parce qu’ils habitent la maison de Dieu qu’ils ont continuellement sujet de le louer ; c’est aussi parce qu’ils cherchent en Dieu seul toute leur force qu’il y a des chemins dans leur cœur, c’est-à-dire, qu’ils sont récompensés de leur confiance par la clarté que Dieu répand dans leur âme, en sorte qu’ils voient distinctement la conduite qu’ils doivent tenir et qu’ils sont affranchis de doutes pénibles sur les décisions qu’ils ont à prendre. C’est à peu près l’idée exprimée dans la traduction de Cahen : Heureux l’homme qui trouve sa force en toi ; c’est une direction pour son cœur.

Verset 7. en traversant la vallée des pleurs, ils en font un lieu arrosé ; la pluie aussi la couvre de bénédictions.

Cette image représente évidemment les consolations que les fidèles trouvent dans leurs épreuves, mais il y a différentes traductions possibles. Nous avons suivi les anciens traducteurs et commentateurs qui rendent les derniers mots du premier hémistiche par vallée des pleurs (expression analogue à celle de vallée de l’ombre de la mort dans Ps 23.4) ; quelques commentateurs modernes traduisent vallée de Bacca, ou vallée des mûriers, mais aucune vallée de ce nom n’est mentionnée dans nos saints livres. — Le second hémistiche représente, sous l’image de la transformation d’une vallée aride et triste en une contrée riante et fertile, la puissance de la foi qui se manifeste dans les jours de l’épreuve. Comp. Mt 5.4 ; Jc 1.3. Tandis que cet hémistiche paraît exprimer les ressources que le fidèle trouve en lui-même, le troisième se rapporte aux grâces qui lui viennent plus directement d’en haut. — Hengstenberg et quelques autres commentateurs, se fondant sur ce que le mot hébreu que nous traduisons par pluie n’a ce sens que dans un seul passage (Jl 2.23), veulent lui conserver aussi ici celui de maître (docteur) qu’il a ordinairement et pensent que le psalmiste a voulu parler de l’édification que les fidèles procurent à d’autres par leurs enseignements ; mais cette idée ne se rattache pas si bien au contexte.

Versets 8-9. Ils vont de force en force et paraissent devant Dieu en Sion. Éternel, Dieu des armées, écoute ma prière! Dieu de Jacob, prête l’oreille! (Sélah).

Les forces d’un voyageur s’épuisent ; mais il n’en est pas de même de ceux qui s’appliquent à s’approcher de Dieu ; au contraire, ils reçoivent grâce sur grâce (Jn 1.18) ; ils prennent de nouvelles forces et les ailes leur reviennent comme aux aigles (Es 40.31).

Verset 10. Ô Dieu! notre bouclier, regarde! Considère la face de ton oint!

Dieu est aussi appelé un bouclier dans Ps 3.3. — À la fin du premier hémistiche il faut sous-entendre quelque chose comme : ma souffrance. — C’est lui-même que le psalmiste désigne en premier lieu en disant ton oint (voyez l’explication donnée sur Ps 2.2), mais il pensait bien peut-être aussi à la promesse divine relative à la venue du Messie, promesse qui était le fondement et la garantie de toutes les autres.

Verset 11. Car mieux vaut un jour dans tes parvis que mille ailleurs ; j’aime mieux me tenir à la porte de la maison de mon Dieu que d’habiter les tentes de la méchanceté ;

Un seul jour passé dans la communion avec Dieu donne de plus abondantes jouissances que celles que le monde peut offrir pendant la plus longue vie, et la mesure même la plus faible de la possession du salut est préférable à toute la prospérité des impies. Comp. Ps 4.8.

Versets 12-13. car l’Éternel Dieu est un soleil et un bouclier ; l’Éternel donne la grâce et la gloire ; il ne refuse aucun bien à ceux qui marchent dans la perfection. Éternel des armées! heureux l’homme qui se confie en toi!

Ce verset et le suivant expliquent pourquoi la communion avec Dieu donne tant de bonheur. Dieu est pour le monde moral ce que le soleil est pour la nature, la source de toute force et de toute vie. La même image se trouve Ps 27.1 ; Mal 3.20. — La gloire pour l’enfant de Dieu commence déjà ici-bas. Comp. Ps 73.25. — Perfection, voyez Ps 15.2.

Pasteur Armand de Mestral, Commentaire sur le livre des Psaumes – Tome 2, p. 93-98


[1] II ne peut pas être question de la fuite de David devant Saül, parce que, à cette époque-là, le sanctuaire n’était pas encore en Sion.

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