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Commentaire sur le Psaume 78

Enseignement. Pour Asaph.

  1. Mon peuple, écoute ma loi, prêtez l’oreille aux paroles de ma bouche.
  2. Je veux ouvrir ma bouche en paraboles, et proclamer les énigmes du passé.
  1. Ce que nous avons entendu, et que nous connaissons, ce que nos pères nous ont raconté,
  2. nous ne le cacherons point à leurs enfants ; nous raconterons les louanges de l’Éternel à la génération future, sa puissance et les merveilles qu’il a opérées.
  3. Il établit un témoignage en Jacob, il plaça une loi en Israël ; il ordonna à nos pères de les faire connaître à leurs enfants,
  4. en sorte que la génération suivante en eût connaissance et que les enfants qui devaient naître, se levassent pour en entretenir leurs enfants,
  5. afin qu’ils missent en Dieu leur confiance, qu’ils n’oubliassent pas les œuvres de Dieu, qu’ils gardassent ses ordonnances,
  6. et qu’ils ne fussent pas comme leurs pères, une race indocile et rebelle, une race dont le cœur n’était point ferme, et dont l’esprit n’était pas fidèle envers Dieu.
  1. Les enfants d’Éphraïm, archers, armés d’un arc, ont tourné le dos au jour de la bataille ;
  2. ils n’ont point gardé l’alliance de Dieu, et ont refusé de marcher suivant sa loi ;
  3. ils ont oublié ses œuvres et ses merveilles qu’il leur avait montrées.
  4. Devant leurs pères il fit des miracles, au pays d’Égypte, dans les campagnes de Tsoan.
  1. Il fendit la mer et les fit passer, et fit tenir les eaux comme un monceau.
  2. Il les conduisit le jour par la nuée, et pendant toute la nuit à la clarté de la flamme.
  3. Dans le désert il fendit des rochers, et les abreuva comme de flots abondants ;
  4. il fit jaillir du rocher des ruisseaux et couler des eaux comme des fleuves.
  5. Mais ils continuèrent à pécher contre lui, à irriter le Très-Haut dans la terre aride.
  6. Ils tentèrent Dieu dans leur cœur, en demandant des aliments pour leur convoitise ;
  7. et ils parlèrent contre Dieu, disant : Dieu pourrait-il dresser une table au désert?
  8. Voici, il a frappé le rocher, des eaux coulèrent et des fleuves se répandirent ; pourra-t-il aussi donner du pain, préparer de la viande pour son peuple?
  9. Aussi l’Éternel l’entendant, fut indigné ; un feu s’alluma contre Jacob et la colère s’éleva contre Israël ;
  10. parce qu’ils n’avaient pas cru en Dieu, et qu’ils ne s’étaient pas confiés en son secours.
  11. Il ordonna aux nuées d’en haut, et ouvrit les portes des cieux ;
  12. il fit pleuvoir sur eux la manne pour nourriture, et leur donna du froment des cieux ;
  13. chacun mangea du pain des Puissants ; il leur envoya de la nourriture à satiété.
  14. Il fit lever dans les airs le vent d’orient, et amena par sa puissance le vent du midi ;
  15. il fit pleuvoir sur eux de la viande comme la poussière, des oiseaux ailés, comme le sable de la mer ;
  16. il les fit tomber au milieu de leur camp, autour de leurs habitations.
  17. Ils mangèrent alors et se rassasièrent pleinement, il contenta leur désir.
  18. Ils n’avaient pas encore assouvi leur désir, leur nourriture était encore dans leur bouche,
  19. que la colère de Dieu éclata contre eux ; il tua les plus vigoureux d’entre eux et abattit la jeunesse d’Israël.
  20. Malgré tout cela ils continuèrent à pécher, et ne devinrent point croyants par ses prodiges.
  21. Aussi il consuma leurs jours dans la fragilité, et leurs années dans la terreur.
  22. Lorsqu’il les frappait de mort, ils s’enquéraient de lui, se retournaient et se hâtaient vers Dieu ;
  23. ils se souvenaient que Dieu était leur rocher, que Dieu, le Très-Haut, était leur rédempteur.
  24. Mais leurs bouches le trompaient, et leurs langues lui mentaient,
  25. leur cœur n’était pas ferme envers lui, et ils n’étaient pas fidèles à son alliance,
  26. Lui cependant était miséricordieux, il couvrit l’iniquité et ne détruisit pas ; souvent il contint sa colère et ne donna pas cours à tout son courroux ;
  27. il se souvint qu’ils n’étaient que chair, un souffle qui s’en va et ne revient plus.
  28. Combien de fois ils l’irritèrent dans le désert, l’affligèrent dans la solitude!
  1. Ils se retournèrent encore, tentèrent Dieu, et limitèrent le Saint d’Israël!
  2. Ils ne se souvinrent plus de son bras et du jour où il les délivra de l’ennemi,
  3. lorsqu’il plaça ses signes en Égypte et ses prodiges dans les campagnes de Tsoan.
  1. Il changea en sang leurs fleuves et leurs ruisseaux, pour qu’ils ne pussent plus boire.
  2. Il envoya contre eux divers insectes qui les dévoraient, et des grenouilles qui les détruisaient ;
  3. il livra leur récolte à l’insecte vorace, et leur travail à la sauterelle.
  4. Il fit périr leurs vignes par la grêle et leurs sycomores par de lourds grêlons.
  5. Il livra leur bétail à la grêle et leurs troupeaux à la foudre.
  6. Il envoya contre eux l’ardeur de sa colère, le courroux, l’indignation et l’angoisse, en envoyant des anges malins ;
  7. il donna libre cours à sa colère, il ne refusa point leurs personnes à la mort, et livra leurs animaux à la peste ;
  8. il frappa tous les premiers-nés en Égypte, les prémices de la vigueur dans les tentes de Cham.
  9. Puis il fit partir son peuple comme des brebis, et les conduisit comme un troupeau dans le désert ;
  10. il les conduisit en sûreté et ils furent sans crainte, tandis que la mer recouvrit leurs ennemis,
  11. et il les fit arriver à la frontière de son sanctuaire, à cette montagne que sa droite a conquise.
  12. Il chassa devant eux des nations, il les leur partagea au cordeau pour héritage, et fît habiter dans leurs tentes les tribus d’Israël.
  13. Mais ils tentèrent et irritèrent Dieu, le Très-Haut, et ne gardèrent point ses témoignages ;
  14. ils s’éloignèrent et devinrent perfides comme leurs pères, ils tournèrent comme un arc détendu,
  15. ils provoquèrent sa colère par leurs hauts-lieux, et sa jalousie par leurs idoles.
  16. Dieu entendit, il s’emporta, et prit Israël en grande aversion.
  17. Il rejeta la demeure de Silo, la tente où il habitait parmi les hommes,
  18. il livra sa puissance à la captivité, et sa magnificence aux mains de l’ennemi.
  19. Il abandonna son peuple au glaive, et s’emporta contre son héritage.
  20. Le feu dévora leurs jeunes hommes, et leurs vierges ne furent pas chantées ;
  21. leurs sacrificateurs tombèrent sous l’épée, et leurs veuves ne pleurèrent pas.
  1. Alors le Seigneur s’éveilla, comme d’un sommeil, semblable à un homme vaillant, que le vin fait chanter ;
  2. Il frappa ses ennemis par derrière, et les chargea d’un opprobre éternel.
  3. Il méprisa la tente de Joseph, et n’élut point la tribu d’Éphraïm ;
  4. mais il élut la tribu de Juda, la montagne de Sion qu’il aime.
  5. Il construisit son sanctuaire, comme les hauts cieux, comme la terre, qu’il a fondée pour toujours.
  6. Il élut David son serviteur, il le tira des parcs des brebis,
  7. et l’amena d’auprès de celles qui allaitent, pour paître Jacob, son peuple, et Israël son héritage ;
  8. il fut leur pasteur avec un cœur parfait, et les conduisit avec des mains intelligentes.

Ce Psaume est un abrégé de l’histoire d’Israël depuis la sortie d’Égypte jusqu’au règne de David, composé de manière à faire ressortir essentiellement, d’un côté, les infidélités multipliées de ce peuple, de l’autre, la patience admirable de Dieu, et sa fidélité à ses promesses. Ces enseignements de l’histoire, instructifs pour les contemporains du psalmiste et pour toutes les générations suivantes, ne seront pas moins utiles à l’Israël des derniers jours quand viendra la terrible tribulation à laquelle se rapportent les Psaumes précédents.

Quant aux fidèles de la nouvelle alliance, St-Paul nous apprend quel usage ils peuvent faire de ce Psaume et de l’histoire d’Israël en général, quand il dit : « Ces choses ont été des figures de ce qui nous regarde, afin que nous ne nous abandonnions point aux mauvais désirs, comme ils s’y abandonnèrent. Ces choses qui leur arrivaient étaient des figures, et elles ont été écrites pour nous servir d’instruction à nous qui nous trouvons à la fin des temps[1] » (1 Co 10.6,11). « Dans ces dispensations de Dieu envers son ancien peuple, le chrétien peut contempler comme dans un miroir les bienfaits qu’il a reçus lui-même et sa propre ingratitude. C’est nous qui sommes le peuple qui doit prêter l’oreille à la loi » (Horne). C’est un des Psaumes que nous devons nous sentir particulièrement poussés à relire et à méditer toutes les fois que nous avons accompli une portion plus ou moins considérable de notre pèlerinage terrestre, ainsi à la fin d’une année, ou bien à l’anniversaire de notre naissance.

Calvin, Rosenmüller et plusieurs autres commentateurs pensent que ce Psaume fut composé postérieurement à la séparation des royaumes de Juda et d’Israël et que c’est à cet événement que l’auteur fait allusion en parlant de la défection de la tribu d’Éphraïm (v. 9). Mais nous ne voyons pas de raison suffisante pour nous départir du principe que tous les Psaumes sont de David d’autant plus que dans celui-ci l’histoire d’Israël ne s’étend que jusqu’à son temps. Si ce Psaume avait été composé depuis la séparation, un événement aussi considérable que celui-là y aurait été sans doute distinctement marqué. Hengstenberg et Stier le placent aussi à l’époque de David ; seulement ils le croient composé par Asaph. Quant à nous, nous donnons aux mots : pour Asaph, le même sens que dans les précédents. — Sur enseignement, voyez l’explication du titre de Ps 32.1.

Dans une première strophe le psalmiste réclame l’attention pour les enseignements qu’il va proclamer (1-2). Dans la seconde, il fait connaître son but, qui était d’empêcher les Israélites de son temps de tomber dans les égarements dont leurs pères s’étaient rendus coupables (3-8). Ces infidélités, en présence desquelles les manifestations de la miséricorde et de la longue attente de Dieu alternent avec celles de sa justice, sont exposées dans les deux strophes principales, dont l’une raconte les péchés du peuple depuis la sortie d’Égypte jusqu’à l’entrée en Canaan (13-40), l’autre les péchés commis dans le pays de Canaan jusqu’au grand désastre de la prise de l’Arche par les Philistins (44-64). Chacune de ces grandes strophes est précédée d’une strophe très courte, formant une espèce de refrain et signalant l’oubli des miracles opérés dans le pays d’Égypte, comme la cause des égarements d’Israël ; chacune de ces petites strophes (vv. 9-12 et 41-43) se termine par des paroles presque identiques (vv. 12 et 43). La seconde grande strophe se compose elle-même d’une introduction dans laquelle le psalmiste énumère les jugements sur l’Égypte, dont le peuple de Dieu aurait dû garder constamment le souvenir (44-55) et du récit des infidélités dont il s’est rendu coupable sur le sol même de la Terre promise (56-64). Enfin, le Psaume se termine par des paroles propres à réveiller l’espérance et la joie chez les Israélites fidèles, en leur rappelant deux témoignages éclatants de la fidélité de Dieu envers son peuple, souvent châtié et humilié, savoir l’établissement du sanctuaire sur la montagne de Sion et l’élévation de son pieux serviteur David à la royauté (65-72).

Verset 1. Mon peuple, écoute ma loi, prêtez l’oreille aux paroles de ma bouche.

Si le psalmiste exige soumission à ses enseignements, c’est qu’il sait qu’il parle au nom de Dieu et sous la direction de son Esprit. C’est pourquoi aussi il appelle le peuple d’Israël mon peuple, se mettant en quelque sorte à la place de Dieu. Quelques commentateurs ont cru que c’était Dieu qui parlait dans ce premier verset. Mais ces paroles, ainsi que celles des versets suivants, se placent plus naturellement dans la bouche de David. — Le mot de loi doit être pris ici dans le sens un peu plus général de doctrine, enseignement. Voyez l’explication de Ps 1.2 et 19.8. — « Cette exhortation à écouter est nécessaire même pour les fidèles, car ils sont quelquefois bien lents à le faire » (Calvin).

Verset 2. Je veux ouvrir ma bouche en paraboles, et proclamer les énigmes du passé.

Sur énigmes, paraboles, voyez Ps 49.5. On peut donner ce nom aux enseignements de l’histoire, car pour les reconnaître il faut un certain travail de l’esprit et du cœur, et ils demeurent voilés pour un observateur superficiel. L’histoire est aussi une prophétie, mais elle ne l’est que pour les intelligents. C’est dans le même sens que St-Paul appelle l’histoire du peuple d’Israël une figure 1 Co 10.6 (voyez l’introduction à ce Psaume et la note). — Le verbe proclamer ne rend pas complètement la valeur du verbe hébreu (naba) faire jaillir qui se retrouve dans Ps 19.3, 45.4. — Saint-Matthieu cite notre verset en en modifiant légèrement les expressions dans le chapitre XIII de son évangile où il rapporte plusieurs des paraboles de Notre Seigneur. « Jésus dit toutes ces choses au peuple en paraboles et il ne leur parlait point sans paraboles, de sorte que ce qui avait été dit par le prophète fut accompli : J’ouvrirai ma bouche en paraboles ; j’annoncerai les choses qui ont été cachées dès le commencement du monde (Mt 13.34-35). L’évangéliste veut dire sans doute que les enseignements donnés par le roi prophète David aux Israélites de son temps préfiguraient les enseignements plus importants encore qui, sous une forme semblable, devaient sortir un jour de la bouche du fils de David.

Verset 3. Ce que nous avons entendu, et que nous connaissons, ce que nos pères nous ont raconté,

La connaissance des événements dont se composait leur histoire devait se transmettre chez les Israélites par la tradition orale aussi bien que par les saintes Écritures. « N’oublie point les choses que tes yeux ont vues, afin que tous les jours de ta vie elles ne sortent pas de ton cœur, mais que tu les enseignes à tes enfants et aux enfants de tes enfants » (Dt 4.9). Et c’est là un commandement qui concerne encore les pères de famille et en général tous les croyants sous la nouvelle alliance. L’Eglise doit être « la colonne et l’appui de la vérité » (1 Tm 3.15) par la parole vivante de ses ministres et de ses membres fidèles, aussi bien que par les livres saints dont elle se trouve dépositaire. — Comparez Ps 44.2.

Verset 4. nous ne le cacherons point à leurs enfants ; nous raconterons les louanges de l’Éternel à la génération future, sa puissance et les merveilles qu’il a opérées.

Le psalmiste, au lieu de dire : nous ne les cacherons point à nos enfants, dit : à leurs enfants, afin de faire mieux ressortir le droit des générations suivantes à être enseignées.

Verset 5. Il établit un témoignage en Jacob, il plaça une loi en Israël ; il ordonna à nos pères de les faire connaître à leurs enfants,

Ce n’est pas seulement de la loi proprement dite (commandements) que le psalmiste veut parler ici, mais aussi de l’histoire sainte qui se trouvait consignée dans les livres sacrés. — L’ordre de transmettre la loi aux générations suivantes se trouve exprimé dans plusieurs passages, entre autres Dt 4.9, 6.6. — L’expression témoignage a été expliquée à l’occasion de Ps 19.8.

Verset 6. en sorte que la génération suivante en eût connaissance et que les enfants qui devaient naître, se levassent pour en entretenir leurs enfants,

« C’est par ses ministres que Dieu propage la vérité dans l’Eglise. Il a également donné aux pères de famille une mission particulière, celle d’instruire avec soin leurs enfants » (Calvin).

Verset 7. afin qu’ils missent en Dieu leur confiance, qu’ils n’oubliassent pas les œuvres de Dieu, qu’ils gardassent ses ordonnances,

« Ce verset nous fait connaître dans quel but la loi a été donnée et transmise » (Calvin).

Verset 8. et qu’ils ne fussent pas comme leurs pères, une race indocile et rebelle, une race dont le cœur n’était point ferme, et dont l’esprit n’était pas fidèle envers Dieu.

Le psalmiste pose en fait que le cœur de ses contemporains n’est pas meilleur que celui de leurs pères ; c’est pourquoi il estime cette exhortation nécessaire. — L’expression cœur ferme a été expliquée à l’occasion de Ps 51.12.

Verset 9. Les enfants d’Éphraïm, archers, armés d’un arc, ont tourné le dos au jour de la bataille ;

En parlant de l’infidélité des générations précédentes, la pensée du psalmiste s’arrête plus particulièrement sur les Éphraïmites qui avaient exercé pendant longtemps une sorte d’hégémonie au milieu des douze tribus, mais qui aussi dans plus d’une occasion avaient donné l’exemple de la rébellion contre Dieu et ses saintes lois. C’est ainsi qu’on les vit refuser de secourir leurs frères attaqués par les Ammonites. Jg 12.12. C’est ainsi encore qu’ils refusèrent pendant un certain temps de se soumettre au sceptre de David (2 S 2.9, 19.41) et ce fut aussi au sein de cette tribu que se prépara la séparation des deux royaumes. La plupart des commentateurs croient que le second membre du verset se rapporte aux défaites essuyées par les Ephraïmites comme châtiment de leurs infidélités envers Dieu et les autres tribus, mais il est plus naturel de voir, comme Hengstenberg, dans les mots ils ont tourné le dos une image de ces infidélités mêmes (envers Dieu et envers les autres tribus), parce que dans toute cette strophe il n’est question que des péchés du peuple d’Israël et que les châtiments n’apparaissent que dans la suivante. — Les commentateurs qui ont cru que ce verset faisait allusion à quelque événement particulier de l’histoire des Ephraïmites, ont fait diverses conjectures, mais ce ne sont que des conjectures et nous croyons que le psalmiste n’a voulu autre chose que caractériser d’une manière générale la conduite et les dispositions de cette tribu. C’est ainsi que le rabbin Jarchi croit qu’il s’agit d’une expédition que les Ephraïmites auraient tentée antérieurement à la sortie d’Égypte et qui aurait eu une issue fâcheuse pour eux, événement qui pourrait être indiqué par un passage du livre des Chroniques (1 Ch 7.21-22). Mais les versets 11 et 12 montrent que le psalmiste veut parler d’événements postérieurs à la sortie d’Égypte. D’autres, comme Calvin et Rosenmüller, croient qu’il s’agit de la défection des dix tribus sous Jéroboam.

Verset 10. ils n’ont point gardé l’alliance de Dieu, et ont refusé de marcher suivant sa loi ;

« L’expression refusé marque l’énormité de leur péché. Ce fut de propos délibéré qu’ils transgressèrent la loi de Dieu » (Calvin).

Verset 11. ils ont oublié ses œuvres et ses merveilles qu’il leur avait montrées.

« La source de l’impiété est l’ingratitude, l’oubli des bienfaits de Dieu » (Calvin). « Que le chrétien qui est surpris des fréquentes rébellions de ce peuple de col roide, se demande comment il a lui-même observé le vœu de son baptême et marché dans la loi de Dieu. Avant de condamner les autres, commençons par nous examiner nous-mêmes » (Horne).

Verset 12. Devant leurs pères il fit des miracles, au pays d’Égypte, dans les campagnes de Tsoan.

Il s’agit des miracles destinés à contraindre les Égyptiens à laisser partir les enfants d’Israël. — Tsoan (nommée aussi Tanis) était l’antique résidence des rois d’Égypte ; cette ville est encore mentionnée dans Nb 13.23 ; Es 19.11,18.

Verset 13. Il fendit la mer et les fit passer, et fit tenir les eaux comme un monceau.

Passage de la mer Rouge.

Verset 14. Il les conduisit le jour par la nuée, et pendant toute la nuit à la clarté de la flamme.

La nuée était le gage d’une grâce plus excellente (l’achèvement du voyage). Aussi St-Paul nous enseigne (1 Co 10.2) à y voir une figure du baptême, dont les fruits ne s’arrêtent pas à la vie présente, si fragile, mais s’étendent jusqu’à la vie éternelle.

Versets 15-16. Dans le désert il fendit des rochers, et les abreuva comme de flots abondants ; il fit jaillir du rocher des ruisseaux et couler des eaux comme des fleuves.

Le psalmiste a probablement en vue à la fois le miracle de Réphidim, Ex 17.6 et celui de Kadès, Nb 20.1,11. « L’abondance des eaux fait ressortir la grandeur du miracle. Si on n’eût vu couler qu’un faible ruisseau, la grâce de Dieu aurait pu être voilée pour des hommes profanes » (Calvin).

       Versets 17-20. Mais ils continuèrent à pécher contre lui, à irriter le Très-Haut dans la terre aride. Ils tentèrent Dieu dans leur cœur, en demandant des aliments pour leur convoitise ; et ils parlèrent contre Dieu, disant : Dieu pourrait-il dresser une table au désert? Voici, il a frappé le rocher, des eaux coulèrent et des fleuves se répandirent ; pourra-t-il aussi donner du pain, préparer de la viande pour son peuple?

David fait allusion aux murmures que le peuple fit entendre à Tabérah et qui sont rapportés dans Nb 11.4-6. Ces plaintes n’étaient point provoquées par la faim, puisque les Israélites recueillaient chaque jour une quantité de manne bien suffisante pour leurs besoins, mais par le désir d’avoir une nourriture plus délicate et plus variée ; c’était donc pour leurs convoitises qu’ils demandaient. — Calvin explique très bien ce que c’est que tenter Dieu : « C’est exiger que Dieu se soumette à notre bon plaisir et qu’il nous accorde plus qu’il n’a voulu nous accorder. » On pourrait ajouter que c’est entreprendre de faire violence à la volonté de Dieu et de l’obliger à nous donner ce que dans sa sagesse il a trouvé bon de nous refuser. « Nous devons donc mettre un frein à nos désirs et savoir nous tenir dans les limites qui nous ont été imposées » (Calvin). — C’est avec raison qu’il est dit qu’ils tentèrent Dieu dans leur cœur, car c’est le cœur qui est la source des murmures, de l’impatience, etc. Comparez Mt 12.35.

Verset 21. Aussi l’Éternel l’entendant, fut indigné ; un feu s’alluma contre Jacob et la colère s’éleva contre Israël ;

Le feu n’est ici qu’une expression figurée pour représenter la colère divine.

Verset 22. parce qu’ils n’avaient pas cru en Dieu, et qu’ils ne s’étaient pas confiés en son secours.

Il y avait dans ces murmures des Israélites à Tabérah non-seulement de la sensualité, mais de l’incrédulité, un manque de confiance en Dieu ; ils n’étaient pas fermement convaincus qu’il fût assez puissant pour leur accorder l’objet de leur convoitise.

Verset 23. Il ordonna aux nuées d’en haut, et ouvrit les portes des cieux ;

Plusieurs commentateurs mettent les verbes de ce verset et les deux suivants au plus-que-parfait, se fondant sur ce que l’envoi de la manne avait commencé bien avant l’arrivée du peuple à Tabérah (voyez Ex 16) ; mais il est à remarquer que dans ce Psaume le poète sacré ne s’est pas astreint à un ordre chronologique rigoureux et qu’il paraît s’être plutôt proposé de grouper ensemble les faits de même espèce. — L’expression portes des cieux doit marquer l’abondance de la manne.

Verset 24. il fit pleuvoir sur eux la manne pour nourriture, et leur donna du froment des cieux ;

Comparez Ex 16.4. « L’Éternel dit à Moïse : Voici, je vais faire pleuvoir des cieux du pain. »

Verset 25. chacun mangea du pain des Puissants ; il leur envoya de la nourriture à satiété.

La plupart des commentateurs, à commencer par les rabbins, pensent que ce sont les anges que le psalmiste appelle ici les forts, de même qu’ils les appellent ailleurs puissants en force (Ps 103.20). — La manne est appelée pain des forts, parce qu’elle descendait du ciel, domicile des anges. C’est l’explication de la paraphrase chaldéenne, suivie par Hengstenberg et Stier. « C’était une ingratitude criante que de dédaigner une nourriture qui faisait d’eux en quelque manière les compagnons des anges » (Calvin).

Verset 26. Il fit lever dans les airs le vent d’orient, et amena par sa puissance le vent du midi ;

Allusion à l’envoi des cailles, raconté dans Nb 11.31. — Les vents qui soufflèrent successivement de deux points différents de l’horizon amenèrent les cailles. — En accordant aux enfants d’Israël la satisfaction de leurs désirs, Dieu voulait à la fois confondre leur incrédulité et les châtier. « Avec ces aliments ils avalèrent la flamme de la colère divine » (Calvin).

Versets 27-29. il fit pleuvoir sur eux de la viande comme la poussière, des oiseaux ailés, comme le sable de la mer ; il les fit tomber au milieu de leur camp, autour de leurs habitations. Ils mangèrent alors et se rassasièrent pleinement, il contenta leur désir.

L’abondance des cailles est constatée par Nb 11.31.

Verset 30. Ils n’avaient pas encore assouvi leur désir, leur nourriture était encore dans leur bouche,

« Quand les hommes se livrent à l’intempérance, le rassasiement n’éteint pas leur ardeur » (Calvin).

Verset 31. que la colère de Dieu éclata contre eux ; il tua les plus vigoureux d’entre eux et abattit la jeunesse d’Israël.

Il s’agit du châtiment raconté dans Nb 11.33. — « Le châtiment sévit premièrement contre ceux qui se glorifiaient le plus de leur force » (Calvin).

Verset 32. Malgré tout cela ils continuèrent à pécher, et ne devinrent point croyants par ses prodiges.

Tout cela, tant châtiments que bienfaits, qui auraient dû les porter à l’obéissance. — Les rabbins et les commentateurs modernes pensent que le psalmiste a ici en vue les dispositions que les Israélites montrèrent lorsque Josué et Caleb revinrent du pays de Canaan. Nb 14.31.

Verset 33. Aussi il consuma leurs jours dans la fragilité, et leurs années dans la terreur.

Allusion à la sentence par laquelle les Israélites sortis d’Égypte furent condamnés à mourir dans le désert avant d’être entrés dans le pays de Canaan. Les mots dans la fragilité[2] pouvaient signifier que leurs jours furent abrégés par cette dispensation de la justice divine. St-Jude en tire un avertissement pour les chrétiens de son temps (Jude 5 et 15).

Verset 34. Lorsqu’il les frappait de mort, ils s’enquéraient de lui, se retournaient et se hâtaient vers Dieu ;

Nous avons un exemple de ces retours momentanés à Dieu dans Nb 14.29-30. Ces conversions passagères, si bien caractérisées par Osée 6.4, ne sont que trop fréquentes dans les afflictions.

Verset 35. ils se souvenaient que Dieu était leur rocher, que Dieu, le Très-Haut, était leur rédempteur.

Leur rocher. Comparez Ps 18.3.

Verset 36. Mais leurs bouches le trompaient, et leurs langues lui mentaient,

« La circonstance qu’ils reconnaissaient leur péché et qu’ils revenaient à Dieu, aggravait leur culpabilité » (Calvin).

Verset 37. leur cœur n’était pas ferme envers lui, et ils n’étaient pas fidèles à son alliance,

Sur le cœur ferme comparez v. 8. — « C’est là la maladie de la plupart des hommes. La majesté de Dieu leur inspire bien un certain respect, mais ils aimeraient mieux que toute lumière fût éteinte » (Calvin).

Verset 38. Lui cependant était miséricordieux, il couvrit l’iniquité et ne détruisit pas ; souvent il contint sa colère et ne donna pas cours à tout son courroux ;

« Il montre pourquoi la ruine ne fut pas complète. Dieu, dans son incomparable sagesse, a recours à différents moyens de guérison » (Calvin). « Si Dieu eût donné cours à tout son courroux, la postérité d’Abraham eût péri tout entière. Mais elle devait être conservée jusqu’aux temps du Messie et elle subsiste encore aujourd’hui » (Horne).

Verset 39. il se souvint qu’ils n’étaient que chair, un souffle qui s’en va et ne revient plus.

Dieu ne peut pas user d’une rigueur extrême envers une créature aussi faible et aussi fragile (idées exprimées par chair) que l’homme. Comparez Ps 103.14-16. — Après les mots ne revient plus, il faut sous-entendre : dans le corps qu’il a quitté[3]. « Ce n’est que par rapport à la vie terrestre qu’il dit que l’esprit ne revient plus ; il ne veut nullement nier l’immortalité de l’âme » (Calvin).

Versets 40-41. Combien de fois ils l’irritèrent dans le désert, l’affligèrent dans la solitude! Ils se retournèrent encore, tentèrent Dieu, et limitèrent le Saint d’Israël!

Le verbe hébreu qui se trouve dans le second hémistiche a été traduit par déshonorer et par provoquer le dégoût, mais les rabbins et les meilleurs commentateurs modernes le rendent comme nous. Limiter Dieu, c’est se faire une idée trop étroite de ses perfections, c’est vouloir lui prescrire ce qu’il doit faire, les moyens dont il doit se servir. — Sur l’expression le Saint d’Israël, voyez Ps 22.4.

Verset 42. Ils ne se souvinrent plus de son bras et du jour où il les délivra de l’ennemi,

Jusqu’ici il avait été question de la conduite des Israélites dans le désert. Depuis ce verset il s’agit d’une autre période de leur histoire, puisque ceux dont les infidélités sont maintenant racontées sont représentés comme ayant perdu de vue, non-seulement les merveilles que Dieu avait opérées pour délivrer leurs pères de la servitude d’Égypte (42-51), mais les dispensations non moins admirables par lesquelles il avait mis son peuple en possession du pays de Canaan (52-55). — Ils ne se souvinrent plus. « C’est de cet oubli impie que naissent toutes les révoltes » (Calvin). — Le bras de l’Éternel représente les prodiges opérés par son bras.

Verset 43. lorsqu’il plaça ses signes en Égypte et ses prodiges dans les campagnes de Tsoan.

Tsoan, voyez v. 12.

Verset 44. Il changea en sang leurs fleuves et leurs ruisseaux, pour qu’ils ne pussent plus boire.

Dans l’énumération des plaies d’Égypte le psalmiste ne suit pas exactement l’ordre historique. Il lui suffisait pour son dessein de faire ressortir les manifestations les plus frappantes de la puissance de Dieu.

Verset 45. Il envoya contre eux divers insectes qui les dévoraient, et des grenouilles qui les détruisaient ;

Le mot hébreu (harob) que nous rendons par divers insectes signifie proprement mélange, mais on s’accorde à penser qu’il faut sous-entendre : d’insectes.

Verset 46. il livra leur récolte à l’insecte vorace, et leur travail à la sauterelle.

Selon plusieurs commentateurs il est question dans ce verset de deux différentes espèces d’insectes (dans le premier hémistiche, quelques-uns traduisent : le grillon) ; nous préférons l’explication d’Hengstenberg, qui considère le mot (Kasil) qui se trouve dans le premier membre comme le nom poétique de la sauterelle ; il est en effet dérivé d’un verbe (Kasal) qui signifie dévorer, couper.

Verset 47. Il fit périr leurs vignes par la grêle et leurs sycomores par de lourds grêlons.

Le sycomore est un arbre qui a du rapport avec le mûrier et dont les fruits, semblables aux figues, servent en Égypte à la nourriture du peuple. — Le dernier mot du verset signifie d’après les rabbins une grosse grêle ; d’autres lui donnent le sens de frimas.

Verset 48. Il livra leur bétail à la grêle et leurs troupeaux à la foudre.

Les ravages de la foudre se mêlèrent à ceux de la grêle. C’est ce qui est aussi rapporté dans Ex 9.23.

Verset 49. Il envoya contre eux l’ardeur de sa colère, le courroux, l’indignation et l’angoisse, en envoyant des anges malins ;

Le dernier hémistiche porte : envoi d’anges de méchancetés. Il parait donc qu’il faut admettre avec les rabbins, St-Augustin et d’autres commentateurs, une intervention des mauvais anges dans les jugements sur l’Égypte. Nous voyons de même Satan employé pour éprouver Job, et à l’époque de Notre Seigneur les malins esprits tourmentent les hommes par des maladies cruelles. Calvin et Hengstenberg pensent que les bons anges seuls furent employés contre l’Égypte et que l’expression du texte hébreu signifie seulement : anges qui apportent des maux.

Verset 50. il donna libre cours à sa colère, il ne refusa point leurs personnes à la mort, et livra leurs animaux à la peste ;

Littéralement : il fraya une route à sa colère. — Au troisième hémistiche nous avons suivi les Septante et la version chaldéenne ; d’autres traduisent : il livra leurs vies à la peste.

Verset 51. il frappa tous les premiers-nés en Egypte, les prémices de la vigueur dans les tentes de Cham.

Les premiers-nés sont représentés dans le second hémistiche par l’expression poétique de prémices de la vigueur. – L’Égypte est appelée terre de Cham, parce que ses habitants descendaient de Mitsraïm, l’un des fils de ce patriarche (Gn 10.6), origine dont le souvenir s’est conservé dans le nom hébreu de l’Égypte : Mitsraïm.

Verset 52. Puis il fit partir son peuple comme des brebis, et les conduisit comme un troupeau dans le désert ;

Même image que dans Ps 77.21.

Verset 53. il les conduisit en sûreté et ils furent sans crainte, tandis que la mer recouvrit leurs ennemis,

Ils furent sans crainte signifie que Dieu les protégea tellement qu’ils n’eurent pas lieu d’éprouver de la crainte. Le psalmiste ne veut pas dire qu’ils n’en aient jamais éprouvé, (ce qui ne s’accorderait pas avec l’histoire des Israélites pendant ce voyage), mais seulement que ces craintes n’étaient pas justifiées par les circonstances.

Verset 54. et il les fit arriver à la frontière de son sanctuaire, à cette montagne que sa droite a conquise.

La montagne de Sion (car c’est de celle-là qu’il s’agit) ne fut occupée par les Israélites qu’assez longtemps après la conquête du reste du pays, mais le psalmiste réunit les deux événements. Comparez Ex 15.17.

Verset 55. Il chassa devant eux des nations, il les leur partagea au cordeau pour héritage, et fît habiter dans leurs tentes les tribus d’Israël.

Sur l’expression au cordeau, voyez Ps 16.6.

Verset 56. Mais ils tentèrent et irritèrent Dieu, le Très-Haut, et ne gardèrent point ses témoignages ;

Le rabbin Kimchi rapporte avec raison ce verset et les deux suivants aux péchés commis depuis la mort de Josué, pendant la période des Juges. On lit fréquemment dans le livre des Juges : « Les enfants d’Israël firent ce qui déplaît à l’Éternel. »

Verset 57. ils s’éloignèrent et devinrent perfides comme leurs pères, ils tournèrent comme un arc détendu,

On pourrait aussi traduire : comme un arc trompeur.

Verset 58. ils provoquèrent sa colère par leurs hauts-lieux, et sa jalousie par leurs idoles.

Les hauts-lieux sont mentionnés fréquemment dans les livres historiques. Les collines étaient volontiers le siège des cultes idolâtres. — « Le mépris de la loi de Dieu produit toujours des fruits semblables ; ceux qui ne veulent pas se soumettre à Dieu se livrent à des rites de leur propre invention et à toutes sortes de superstitions » (Calvin).

Verset 59. Dieu entendit, il s’emporta, et prit Israël en grande aversion.

Le psalmiste se représente que le bruit des mauvaises œuvres du peuple monte aux oreilles de l’Éternel.

Verset 60. Il rejeta la demeure de Silo, la tente où il habitait parmi les hommes,

Le tabernacle avait été dressé à Silo (ville de la tribu d’Éphraïm) à l’époque de la conquête (Js 18.1) et il y était resté pendant toute la période des Juges. Cette circonstance créait un privilège éminent pour cette localité et pour la tribu à laquelle elle appartenait. Mais cette tribu s’étant signalée par ses infidélités (comp. v. 9), ce privilège lui fut retiré, ce qui arriva lorsque l’arche de l’alliance fut enlevée par les Philistins (1 S 4.11) et ensuite transportée à Jérusalem. Cet abandon de Silo dut faire une vive impression sur tout le peuple et plusieurs siècles plus tard le prophète Jérémie en tirait un sérieux avertissement pour ses contemporains : « Allez maintenant à ma résidence, à Silo, là où je faisais habiter mon nom jadis, et voyez comment je l’ai traitée à cause de la méchanceté de mon peuple d’Israël » (Jr 7.12). « La destruction de Jérusalem et celle de nombre d’églises chrétiennes en Asie et en Afrique, nous donnent des avertissements semblables » (Horne). — On pourrait aussi traduire : la tente qu’il avait fait habiter parmi les hommes. Comp. Ps 68.19.

Verset 61. il livra sa puissance à la captivité, et sa magnificence aux mains de l’ennemi.

C’est l’arche que le psalmiste appelle la puissance de Dieu, parce qu’elle était un symbole et un gage de la protection qu’il accordait à son peuple. Elle est appelée sa magnificence, parce que ses glorieuses perfections y étaient représentées sous une forme sensible, par le propitiatoire, les chérubins, les tables de la loi, etc.

Verset 62. Il abandonna son peuple au glaive, et s’emporta contre son héritage.

Allusion à la terrible défaite qui coûta la vie à trente mille Israélites. 1 S 4.10.

Verset 63. Le feu dévora leurs jeunes hommes, et leurs vierges ne furent pas chantées ;

Il ne s’agit probablement pas d’un feu matériel, mais de celui de la colère divine. Abenesra et Kimchi disent que c’est le feu de la guerre. — Par suite de la mort de tant de jeunes guerriers beaucoup de vierges restèrent non mariées, en sorte qu’on n’eut pas l’occasion de faire entendre en leur honneur des chants nuptiaux. C’est le sens qui est donné au mot chantées par les rabbins, par Calvin et par Hengstenberg.

Verset 64. leurs sacrificateurs tombèrent sous l’épée, et leurs veuves ne pleurèrent pas.

Leurs sacrificateurs, allusion à la mort des fils d’Héli (1 S 4.11). Les rabbins et Stier pensent que les veuves ne purent pas pleurer leurs maris, parce qu’elles moururent le même jour qu’eux, ce qui est constaté quant à celle de Phinées (1 S 4.19). Calvin pense qu’elles furent emmenées en captivité et ainsi empêchées de vaquer aux funérailles.

Verset 65. Alors le Seigneur s’éveilla, comme d’un sommeil, semblable à un homme vaillant, que le vin fait chanter ;

Quand Dieu livre son peuple aux ennemis il semble endormi ; quand ses coups se dirigent contre ces derniers, il semble se réveiller. Même image dans Ps 35.23. Il s’agit du jugement sur les Philistins 1 S 5. — Nous avons traduit les derniers mots du verset comme Hengstenberg, qui les rapproche d’un autre passage : le vin réjouit le cœur de l’homme (Ps 103.15). On pourrait aussi avec Abenesra et plusieurs autres commentateurs anciens et modernes, traduire : vaincu par le vin. Le réveil de l’Éternel serait alors comparé à celui d’un homme qui sort d’un état d’assoupissement causé par le vin. Mais le sens ordinaire du verbe hébreu favorise la première traduction.

Verset 66. Il frappa ses ennemis par derrière, et les chargea d’un opprobre éternel.

Les rabbins voient dans le premier hémistiche de ce verset une allusion au châtiment particulier que Dieu infligea aux Philistins (1 S 5.6) ; cependant le psalmiste peut avoir voulu dire simplement qu’il les mit en fuite. Comparez Ps 9.4, 35.4.

Verset 67. Il méprisa la tente de Joseph, et n’élut point la tribu d’Éphraïm ;

Ce verset se rattache au v. 60 et montre le maintien de la sentence prononcée contre Silo et la tribu d’Éphraïm. « Tout en châtiant les Philistins, Dieu ne rétablit point les choses dans leur premier état ; il voulut que l’abandon de Silo fut un monument perpétuel de sa colère » (Calvin). — Joseph désigne ici et dans d’autres passages la tribu d’Éphraïm, parce que Joseph était père d’Éphraïm. — La tente désigne probablement la tente sacrée, le tabernacle, comme au v. 50. Selon d’autres il s’agit des tentes (habitations) des descendants de Joseph.

Verset 68. mais il élut la tribu de Juda, la montagne de Sion qu’il aime.

Le psalmiste s’empresse de montrer, ainsi qu’il l’a fait dans tout le cours de ce Psaume, comment la miséricorde de Dieu vint tempérer les coups de sa justice et faire surabonder la grâce là où le péché avait abondé. Israël devait être châtié, mais non point entièrement rejeté ; c’est pourquoi le privilège de posséder l’arche sainte, retiré à la tribu d’Éphraïm, fut accordé à celle de Juda. Mais afin de bien faire sentir que ce fut pour cette dernière une faveur non méritée, une grâce, il emploie le verbe élire (en hébreu bakar), qui exprime la liberté de choix. « Il ne fallait pas que la cause de cette dispensation fût cherchée ailleurs qu’en Dieu. La restauration ne fut pas moins gratuite que la première adoption du peuple » (Calvin). — Sur la montagne de Sion, voyez l’explication de Ps 2.6.

Verset 69. Il construisit son sanctuaire, comme les hauts cieux, comme la terre, qu’il a fondée pour toujours.

Littéralement : comme tes lieux élevés. Selon Jarchi cette expression désigne le ciel. Le nouveau domicile que l’Éternel s’était choisi sur la montagne de Sion, devait ressembler aux cieux par sa grandeur et sa magnificence, à la terre par sa durée. Sans doute le temple de Jérusalem a été détruit et cela à deux reprises, et aujourd’hui il n’est pas encore relevé, mais les prophéties nous annoncent que le temps viendra où Jérusalem recouvrera ses privilèges. Comparez Ps 43.9, 87.1.

Verset 70. Il élut David son serviteur, il le tira des parcs des brebis,

Il le tira des parcs des brebis. Allusion à la première condition de David. 1 S 16.11.

Verset 71. et l’amena d’auprès de celles qui allaitent, pour paître Jacob, son peuple, et Israël son héritage ;

« La grâce de Dieu se montra d’une manière éclatante dans cette dispensation qui fit un roi d’un homme simple et d’humble condition. C’est pourquoi aussi les commencements du royaume de Jésus-Christ furent petits et obscurs, afin que la réalité correspondît avec le type » (Calvin).

Verset 72. il fut leur pasteur avec un cœur parfait, et les conduisit avec des mains intelligentes.

Comme conducteur de son peuple, David possédait les qualités qui se trouvent au plus haut degré en Jésus-Christ, le divin berger. Comparez Es 40.11. — L’expression cœur parfait se trouve expliqué par Ps 18.24. — La main est mentionnée comme servant d’instrument à l’âme. — Calvin explique très bien ce qu’est une main intelligente : « David était gouverné lui-même par le Saint-Esprit de telle sorte qu’il ne mettait la main à aucun ouvrage témérairement, et avant d’avoir reconnu sa mission et son devoir. »

Pasteur Armand de Mestral, Commentaire sur le livre des Psaumes – Tome 2, p. 55-72


[1] Le mot grec (tupos) que nos versions rendent par figure ou exemple dans ce passage, signifie proprement un modèle.

[2] Littéralement : dans un souffle.

[3] On pourrait traduire aussi : un esprit qui s’en va et ne revient plus.

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