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Commentaire sur le Psaume 63

  1. Pour David. Lorsqu’il était dans le désert de Juda.
  1. Ô Dieu, tu es mon Dieu! Je m’empresse de te chercher, mon âme a soif de toi, ma chair languit après toi, dans une terre aride, épuisée, sans eau!
  2. C’est ainsi que je t’ai contemplé dans le sanctuaire, voyant ta puissance et ta gloire.
  3. Car ta grâce est meilleure que la vie : mes lèvres te loueront!
  4. C’est ainsi que je te bénirai durant ma vie, en ton nom je lèverai mes mains.
  5. Mon âme sera rassasiée comme de moelle et de graisse, et, la jubilation sur les lèvres, ma bouche chantera,
  6. lorsque je me souviendrai de toi sur ma couche et que je méditerai sur toi dans les veilles!
  1. Car tu as été pour moi un secours, et à l’ombre de tes ailes je pousserai des cris de joie.
  2. Mon âme se colle à toi, ta droite me soutient.
  3. Mais ceux-là se perdent qui cherchent ma vie ; ils descendront dans les lieux les plus profonds de ta terre.
  4. On les livrera au tranchant du glaive, ils seront la proie des chacals.
  5. Et le roi se réjouira en Dieu ; celui qui jure par Lui se félicitera, mais la bouche des menteurs sera fermée.

Les commentateurs juifs et Calvin pensent que ce Psaume fut composé pendant les persécutions de Saül. Les livres historiques nous apprennent en effet que les déserts lui servirent souvent de lieu de retraite dans ce temps-là. 1 S 22.5, 23.14-15, 24.2. Le désert de Juda était une contrée sauvage et montagneuse dans la partie orientale de la tribu de Juda. Hengstenberg et d’autres commentateurs modernes croient qu’il s’agit plutôt de sa fuite devant Absalom, pendant laquelle il se réfugia également dans le désert (2 S 17.16) ; ils se fondent surtout sur ce qu’au v. 12 le psalmiste se donne le titre de roi, qu’il n’avait pas l’habitude de prendre avant la mort de Saül. Cette raison ne nous semble cependant pas assez forte pour nous porter à abandonner la première opinion qui repose peut-être sur la tradition juive. En effet, du vivant de Saül, le psalmiste savait qu’il avait été appelé au trône par un décret divin qui lui avait transféré la couronne, et par l’onction qu’il avait reçue (1 S 16.1-13) ; il pouvait donc très bien prendre quelquefois le titre de roi par anticipation. C’est ainsi que l’enfant de Dieu, environné des misères de ce monde et de ses propres infirmités, trouve une grande consolation à se rappeler qu’il est « roi et sacrificateur » et appelé à « régner sur la terre ». Ap 1.6, 5.10.

Quelles que soient les circonstances dans lesquelles ce beau Psaume fut composé, nous y trouvons un exemple bien remarquable de la force que le fidèle puise au milieu de ses épreuves dans le sentiment de sa communion avec Dieu. « Nous voyons que David ne fut jamais accablé par ses maux au point de ne plus pouvoir adresser ses vœux au ciel et se reposer avec une ferme confiance sur les promesses de Dieu, et nous devons y faire d’autant plus attention que quelquefois les plus petites tentations nous enlèvent presque la connaissance de Dieu » (Calvin). « Ce Psaume est une prière convenable pour ceux qui sont privés de la parole de Dieu par la tyrannie des princes sous lesquels ils vivent. Malgré cela ils doivent se glorifier d’être les enfants de Dieu et ses héritiers, parce qu’ils ont la foi et qu’ils aiment sa parole » (Luther). St-Augustin et d’autres docteurs font observer avec raison que ce Psaume exprime également les pensées du Messie qui pendant sa vie terrestre se trouvait avoir échangé les cieux contre un désert, et celles du peuple de Dieu (Israël et l’Église) dans les temps où il est forcé de se réfugier au désert. Ap 12.6.

Dans les deux strophes (2-7 et 8-12) le psalmiste déclare que c’est en Dieu qu’il trouve sa force et sa consolation, mais c’est dans la seconde que le ferme espoir de se voir bientôt délivré de ses cruels et puissants ennemis est le plus fortement marqué.

Verset 2. Ô Dieu, tu es mon Dieu! Je m’empresse de te chercher, mon âme a soif de toi, ma chair languit après toi, dans une terre aride, épuisée, sans eau!

Le psalmiste commence par dépeindre les souffrances de son corps et celles de son âme. Son corps était abattu par la fatigue, la soif, le manque d’aliments, et son âme soupirait principalement après les témoignages de l’amour de Dieu et après le culte public dont il se trouvait privé depuis qu’il avait quitté Jérusalem. L’épreuve a généralement pour effet chez les vrais fidèles de les porter à sentir plus vivement le prix de la communion avec Dieu et le besoin qu’ils ont de sa grâce. « La plupart des hommes ont soif, mais ce n’est pas de Dieu. L’un soupire après l’or et l’argent, un autre après des honneurs, un troisième après une femme, un quatrième après des enfants ; et il s’en trouve à peine un qui dise : « J’ai soif de Dieu. » C’est du monde que les hommes ont soif, et ils ne s’aperçoivent pas qu’ils sont dans le désert et qu’ils devraient avoir soif de Dieu » (St-Augustin). C’est pourquoi notre Seigneur a dit : « Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice. » Mt 5.6. — Le verbe hébreu que nous rendons par chercher avec empressement, signifie proprement : faire une chose de bon matin, au point du jour. Il paraît dériver du mot (chakar) qui signifie l’aurore.

Verset 3. C’est ainsi que je t’ai contemplé dans le sanctuaire, voyant ta puissance et ta gloire.

La particule (ken) qui lie ce verset au précédent et que nous rendons par c’est ainsi, paraît indiquer de la part du psalmiste le désir d’obtenir au milieu du désert des bénédictions spirituelles aussi abondantes que celles qu’il avait goûtées précédemment dans le service divin. L’état d’âme dans lequel il se trouvait alors est très bien décrit par Calvin : « Le psalmiste montre que son cœur n’était pas lié aux symboles extérieurs. Il n’en est pas de même des hommes grossiers et superstitieux ; ils paraissent remplis de zèle et comme transportés au ciel aussi longtemps que les cérémonies sont devant leurs yeux ; mais leur religion disparaît en même temps que ce spectacle. Apprenons par l’exemple de David que lors même qu’il nous arrive d’être privés de tous les signes extérieurs de la grâce de Dieu et de nous trouver au milieu des abîmes, nous devons fixer sur Dieu les regards de notre foi et ne pas lui tourner le dos dès que les signes visibles nous sont enlevés. C’est ainsi que le lavage spirituel dont Jésus-Christ nous a donné une représentation dans le baptême, doit rester gravé dans nos cœurs pendant toute notre vie. C’est ainsi encore que l’union mystérieuse de Jésus-Christ avec les membres de son corps, doit nous être présente non seulement dans l’acte même de la Cène, mais en tout temps. » — David savait trouver le Seigneur sans le secours des moyens extérieurs, néanmoins il sentait combien ce secours est précieux, et c’était pour lui une véritable souffrance d’en être privé. C’est ce que nous montrent ces paroles qu’il adressa pendant sa fuite devant Absalom au sacrificateur Tsadok : « Si j’ai trouvé grâce devant l’Éternel, il me ramènera et me fera voir l’arche avec son tabernacle. » 2 S 15.25. (Comp. Ps 27.4)[1]

Verset 4. Car ta grâce est meilleure que la vie : mes lèvres te loueront!

Ce verset indique le motif qui fait que le psalmiste soupire avec tant d’ardeur après les témoignages de l’amour de Dieu. Il se rattache étroitement au verset 2, en sorte que l’on peut considérer le verset 3 comme une sorte de parenthèse. — Calvin dit avec raison que, dans ce passage, le mot vie représente tout ce qui, aux yeux des hommes, constitue une existence heureuse, savoir la santé, les honneurs, la fortune. Or, toutes ces choses peuvent manquer aux fidèles sans qu’ils cessent d’être heureux, car la grâce de Dieu leur reste. Comp. Ps 36.8-10.

Verset 5. C’est ainsi que je te bénirai durant ma vie, en ton nom je lèverai mes mains.

Les commentateurs s’accordent à penser que David parle ici du temps où Dieu l’aura exaucé et ramené près du sanctuaire. — Sur l’expression « lever les mains » voyez Ps 28.2 ; 1 Tm 2.8.

Verset 6. Mon âme sera rassasiée comme de moelle et de graisse, et, la jubilation sur les lèvres, ma bouche chantera,

On sait que les bénédictions spirituelles sont fréquemment comparées à un repas abondant et succulent. Comp. Es 55.1.

Verset 7. lorsque je me souviendrai de toi sur ma couche et que je méditerai sur toi dans les veilles!

« Lorsque nous n’avons plus les hommes devant les yeux, notre esprit se fixe plus librement sur les sujets auxquels il veut penser » (Calvin). Comp. Ps 4.5. — Les Hébreux du temps de David partageaient la nuit en trois portions égales qu’ils appelaient des « veilles. » Plus tard on en fit quatre. Mt 14.25.

Verset 8. Car tu as été pour moi un secours, et à l’ombre de tes ailes je pousserai des cris de joie.

La belle image des ailes de l’Éternel se retrouve dans Ps 17.8, 61.5.

Verset 9. Mon âme se colle à toi, ta droite me soutient.

Hengstenberg fait remarquer qu’il y a réciprocité dans les relations qui existent entre Dieu et le fidèle. L’homme pieux s’attache à Dieu, et c’est Dieu qui lui donne la force de le faire. — Le verbe (davak) est ordinairement traduit par s’attacher, mais nous avons cru devoir employer une expression qui en rend encore mieux l’énergie (se coller), qui se trouve déjà dans la version des Septante, et à laquelle St-Augustin fait allusion quand il dit : « Mon âme a été collée à toi. Quelle est cette colle? C’est l’amour. Puisse cette affection naître au-dedans de vous. Et si elle y existe déjà, il faut qu’elle soit arrosée, qu’elle se développe et qu’elle prenne assez de force pour que vous aussi, vous puissiez dire de tout votre cœur : Mon âme est collée à toi. »

Verset 10. Mais ceux-là se perdent qui cherchent ma vie ; ils descendront dans les lieux les plus profonds de ta terre.

Le premier hémistiche est très concis, il se traduirait littéralement : « Eux, pour la perdition, cherchent ma vie. » Aussi la traduction qui se trouve dans la plupart des versions peut se justifier : « Eux, cherchent ma vie pour la perdre, » mais celle que nous préférons avec Hengstenberg établit un parallélisme plus complet avec le second hémistiche. — En parlant des lieux les plus profonds de la terre comme du séjour destiné aux méchants, le psalmiste fait peut-être allusion à Coré et à ses compagnons qui furent engloutis tout vivants. Nb 16.32.

Verset 11. On les livrera au tranchant du glaive, ils seront la proie des chacals.

Ce verset nous rappelle la fin ignominieuse qui est annoncée aux ennemis du Messie. Ap 19.17-21. Comp. Lc 19.27. « Les cadavres des fidèles peuvent sans doute aussi devenir la proie des bêtes. Mais il y a cette grande différence, c’est que Dieu recueille les ossements de ses serviteurs et les place sous bonne garde ; mais pour les réprouvés la dispersion de leurs os est le prélude de la perdition éternelle » (Calvin)[2].

Verset 12. Et le roi se réjouira en Dieu ; celui qui jure par Lui se félicitera, mais la bouche des menteurs sera fermée.

Les commentateurs sont partagés sur le sens du second hémistiche. La plupart rapportent le pronom (lui) à Dieu et pensent que le psalmiste veut faire ressortir le bonheur de ceux qui, pénétrés d’amour et de respect envers Dieu, tiennent religieusement les serments qu’ils ont faits en son nom. D’autres (Hengstenberg, Ewald, Tholück) pensent que le contexte porte plutôt à croire qu’il a voulu parler de ceux qui, dans un temps de bouleversement, se montraient fidèles au roi légitime. C’était la coutume chez les Orientaux de faire aussi intervenir le nom des rois dans les serments et dans d’autres déclarations solennelles. Gn 42.15-16 ; 2 S 15.21. La première explication nous semble cependant plus simple. « Si les sujets de David avaient lieu de se glorifier de leur roi, à combien plus forte raison les sujets et les adorateurs du Messie ne peuvent-ils pas se glorifier de leur roi victorieux, et à combien plus forte raison ceux qui blasphèment contre un pareil Sauveur et qui le haïssent, ne seront-ils pas confondus quand ils le verront revêtu de toute la puissance et de toute la majesté du Père et assis sur le trône du jugement. Assurément alors la bouche des menteurs sera fermée » (Horne).

Pasteur Armand de Mestral, Commentaire sur le livre des Psaumes, p. 403-408


[1] On peut aussi donner un autre sens à la particule qui commence ce verset. Voici l’explication de De Wette : « Alors (c’est-à-dire lorsque tu m’auras exaucé et délivré de mes ennemis) je te contemplerai dans le sanctuaire. » Mais la traduction que nous donnons est plus littérale, le verbe étant en hébreu au passé et non au futur. Il est vrai que le passé a assez souvent la valeur du futur (passé prophétique).

[2] La traduction que nous donnons pour le premier hémistiche est celle du rabbin Jarchi et de la plupart des commentateurs modernes. Mais on pourrait traduire aussi : « Ils le livrent au tranchant du glaive. » Dans ce cas, ce premier hémistiche se rapporterait non pas au châtiment des impies, mais à leurs desseins contre le juste.

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