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Commentaire sur le Psaume 17

  1. Prière, pour David. Ô Éternel, écoute la justice! Sois attentif à mon cri! Prête l’oreille à ma prière, qui ne sort point de lèvres trompeuses!
  2. Mon droit ressortira de devant toi! Tes yeux considèrent la droiture!
  3. Tu sondes mon cœur, tu le visites la nuit, tu me fais passer au creuset ; tu ne trouves rien ; ma parole ne va point au-delà de ma pensée.
  4. En face des actions de l’homme, fidèle à la parole de tes lèvres, je me garde des voies du transgresseur.
  5. Soutiens mes pas dans tes sentiers, et que mes pieds ne bronchent point!
  6. Moi, je t’invoque, car tu me réponds, ô Dieu! Incline ton oreille vers moi, écoute mes paroles!
  7. Rends admirables tes gratuités, toi qui par ta droite délivres des rebelles, ceux qui ont confiance en toi.
  1. Garde-moi comme la prunelle de l’œil, et couvre-moi sous l’ombre de tes ailes,
  2. contre les méchants qui me détruisent, contre les ennemis de ma vie qui m’enveloppent.
  3. Ils s’enferment dans leur graisse, de leurs bouches ils parlent avec hauteur.
  4. A chacun de nos pas maintenant ils m’entourent ; de leurs yeux ils visent à me terrasser,
  5. pareils au lion avide d’une proie, au jeune lion caché en embuscade.
  6. Lève-toi, ô Éternel! Préviens-le, renverse-le! Délivre-moi du méchant par ton épée,
  7. des gens, par ta main, ô Éternel, des gens du siècle, dont la portion est dans la vie et dont tu remplis le sein de tes trésors ; ils ont des fils en abondance et ils laissent leur superflu à leurs petits enfants.
  8. Moi, par la justice, je contemplerai ta face, et à mon réveil je serai rassasié de ta figure!

Le contenu de ce Psaume répond bien à son titre : Prière pour David. Comme il a des rapports assez nombreux avec les précédents, notamment avec le Ps 7 et le Ps 10, on peut le rapporter également à l’époque des persécutions de Saül. Rieger fait remarquer que nous trouvons, dans cette prière dictée par le Saint-Esprit, un modèle de ce que doivent être les nôtres quand nous nous trouvons dans l’angoisse ; à ce point de vue, nous devons l’étudier avec soin.

Dans la première strophe, le psalmiste fonde l’espoir qu’il a d’être exaucé sur l’obéissance à laquelle il s’est appliqué envers Dieu (1-7) ; dans la seconde, il fait valoir la méchanceté de ses ennemis, assuré que la justice divine ne peut manquer de rendre promptement à chacun selon ses œuvres (8-15).

Verset 1. Prière, pour David. Ô Éternel, écoute la justice! Sois attentif à mon cri! Prête l’oreille à ma prière, qui ne sort point de lèvres trompeuses!

Écoute la justice! (c’est à dire : ma justice). Quand nous sentons que notre cœur est droit devant Dieu, nous avons plus de liberté et de confiance dans nos prières, c’est pourquoi David commence par parler de sa justice (voyez Introduction, chap. VI). St-Jean dit aussi : « Si notre cœur ne nous condamne point, nous avons assurance envers Dieu, et quoi que nous demandions, nous le recevons de lui, parce que nous gardons ses commandements et que nous faisons les choses, qui lui sont agréables. » 1 Jean 3.21,22. — Sur l’expression mon cri, voyez Ps 3.5. Mais les prières de David ne se distinguaient pas seulement par la ferveur ; elles étaient encore la fidèle représentation de ses sentiments, elles partaient du cœur ; c’est pourquoi il ajoute : non point de lèvres trompeuses.

Verset 2. Mon droit ressortira de devant toi! Tes yeux considèrent la droiture!

Le bon droit des fidèles peut être manifesté déjà en ce monde par les dispensations de la Providence divine. « Une cour pleine d’équité siège continuellement dans le ciel et on peut en appeler devant elle des sentences iniques que les nommes prononcent ici-bas » (Horne).

Verset 3. Tu sondes mon cœur, tu le visites la nuit, tu me fais passer au creuset ; tu ne trouves rien ; ma parole ne va point au-delà de ma pensée.

« Injustement accusé par les hommes, David en a appelé au tribunal de Dieu ; mais pour ne pas paraître l’avoir fait avec légèreté, il déclare se soumettre à un examen sévère » (Calvin). — « Tu sondes mon cœur » (comparez Ps 7.9,10, 11.5,6). Dieu ne cesse jamais de sonder les cœurs, mais c’est pendant la nuit que nous en avons la conviction la plus nette ; la parole de Dieu et notre propre conscience remplissent plus facilement leur office de juges lorsque nous ne sommes plus retenus par la crainte des hommes, ni préoccupés par les affaires de la vie (comparez Ps 4.5, 16.7). — Ce n’est que dans une certaine mesure que le fidèle, même le plus avancé, peut dire de lui-même : Tu n’as rien trouvé (aucune souillure, aucune injustice). Aussi c’est toujours en Christ que nous devons chercher le parfait accomplissement de ce Psaume comme de tous les autres. — En disant : ma parole ne va point au-delà de ma pensée (traduction plus exacte que celle qui est souvent donnée : « ma pensée ne va pas au-delà de ma parole »), le psalmiste répète ce qu’il a dit de sa parfaite sincérité (verset 1).

Verset 4. En face des actions de l’homme, fidèle à la parole de tes lèvres, je me garde des voies du transgresseur.

Hengstenberg fait remarquer que l’expression : actions de l’homme, indique probablement des œuvres mauvaises, parce que ce sont celles que l’homme fait habituellement et auxquelles il est poussé par la pente naturelle de son cœur. Or, pour résister à la double influence des mauvais exemples et du mal que nous portons au-dedans de nous, il est indispensable de nous tenir attachés à la parole de Dieu. Comparez Ps 1.1,2, 119.9,11. Le « transgresseur » est celui qui rompt les barrières des lois divines et humaines. Comp. Dn 11.14[1].

Verset 5. Soutiens mes pas dans tes sentiers, et que mes pieds ne bronchent point!

Soutiens mes pas dans tes sentiers! s’écrie le psalmiste. La parole de Dieu nous montre bien dans quelle direction nous devons marcher, mais c’est sa grâce qui seule peut nous donner la force de le faire. « Bien que le psalmiste pût se glorifier d’avoir gardé la justice au milieu de tentations très violentes, cependant, sentant sa faiblesse, il demande encore à Dieu la grâce de la persévérance. Plus une âme est avancée et plus elle doit se tenir en garde contre le précipice. Car Satan est fort habile à se faire des armes de nos vertus mêmes, afin de nous endormir dans la sécurité » (Calvin). La traduction que nous donnons de ce verset est celle des anciennes versions, des rabbins, de Calvin et de plusieurs commentateurs modernes. Nous devons cependant en mentionner une autre que la grammaire autorise également, mais qui nous paraît moins naturelle et qui est préférée par Ewald, Hengstenberg. « Mes pas se sont attachés à tes sentiers, mes pieds n’ont point chancelé. » Si l’on adopte cette traduction, le verset 5 ne serait pas une prière, mais une continuation du témoignage que le psalmiste se rend à lui-même[2].

Verset 6. Moi, je t’invoque, car tu me réponds, ô Dieu! Incline ton oreille vers moi, écoute mes paroles!

Car tu me réponds, ô Dieu! Les expériences du passé encouragent le psalmiste à compter sur de nouvelles délivrances.

Verset 7. Rends admirables tes gratuités, toi qui par ta droite délivres des rebelles, ceux qui ont confiance en toi.

La pensée du psalmiste est bien développée par Calvin : « Voyant qu’il ne pouvait être délivré que par quelque moyen rare et insolite, il fonde son espoir sur la puissance merveilleuse du Seigneur. L’angoisse le force à attendre un miracle. » De Wette, de son côté, fait sur ces paroles de David une réflexion qui caractérise bien l’école rationaliste. « Cette prière et celle du verset suivant sont presque indiscrètes; mais elles s’expliquent par l’esprit de la religion hébraïque qui n’enseignait pas encore la résignation chrétienne. » Nous répondons avec Tholuck : « Ces expressions d’une confiance filiale paraissent folie à ceux qui n’ont point de témoignage de la bonté de Dieu dans leur propre cœur. Quant à nous, chrétiens, qui savons que Dieu a donné pour nous son Fils unique, nous ne pouvons pas en être surpris. » Romains 8.31[3].

Verset 8. Garde-moi comme la prunelle de l’œil, et couvre-moi sous l’ombre de tes ailes,

Le choix des deux images si belles et si touchantes, qu’il emploie dans ce verset, a pu être suggéré au psalmiste par le souvenir d’un passage du Deutéronome. Dt 32.10,11. La première se retrouve Za 2.8, la seconde Ps 61.5, 63.8, 91.4, et dans la bouche de notre Sauveur. Mt 23.37. « Par le fait même que cette formule de prière a été dictée par le Saint-Esprit, elle renferme une promesse » (Calvin).

Verset 9. contre les méchants qui me détruisent, contre les ennemis de ma vie qui m’enveloppent.

Le tableau que le psalmiste fait de ses ennemis est destiné à émouvoir Dieu en sa faveur. Calvin fait remarquer que, quoique Dieu n’ait pas besoin que nous lui fassions connaître notre situation, il a institué la prière, parce qu’il veut que les fidèles témoignent la confiance qu’ils ont en sa bonté en déposant dans son sein leurs peines et leurs inquiétudes[4].

Verset 10. Ils s’enferment dans leur graisse, de leurs bouches ils parlent avec hauteur.

« Ils s’enferment dans leur graisse. » La graisse est probablement ici une image de l’abondance dont jouissent les méchants (voyez Dt 32.15,16) ; selon d’autres, c’est une image de l’orgueil, de l’endurcissement du cœur. Comparez Ps 10.2-4.

Verset 11. A chacun de nos pas maintenant ils m’entourent ; de leurs yeux ils visent à me terrasser,

Le psalmiste emploie tantôt le singulier, tantôt le pluriel (nos pas), parce qu’il porte également dans son cœur les autres fidèles, exposés comme lui aux persécutions des méchants.

Verset 12. pareils au lion avide d’une proie, au jeune lion caché en embuscade.

Image qui se retrouve Ps 7.3, 10.8,9. Elle représente à la fois la violence et la ruse.

Verset 13. Lève-toi, ô Éternel! Préviens-le, renverse-le! Délivre-moi du méchant par ton épée,

« Lève-toi. » Voyez Ps 3.8. —Nous avons traduit ce verset comme le font la plupart des commentateurs modernes. Il est vrai que l’on est obligé de sous-entendre devant les mots ton épée la préposition par qui ne se trouve pas dans l’original, mais les usages de la langue le permettent. Cependant nous devons aussi mentionner la traduction donnée par tous les rabbins et par la version anglaise : délivre-moi du méchant, ton épée (c’est-à-dire : qui est ton épée). A l’appui de cette traduction, on fait remarquer que les méchants sont souvent représentés comme des instruments que Dieu emploie pour accomplir ses desseins et pour éprouver ses enfants. Dt 32.41 ; Es 10.5. Mais cette pensée irait moins bien dans le contexte.

Verset 14. des gens, par ta main, ô Éternel, des gens du siècle, dont la portion est dans la vie et dont tu remplis le sein de tes trésors ; ils ont des fils en abondance et ils laissent leur superflu à leurs petits enfants.

En hébreu les mots ta main ne sont précédés d’aucune préposition ; aussi on pourrait les considérer comme un développement du mot gens et traduire : des gens qui sont ta main (c’est-à-dire : tes instruments). Mais notre traduction est plus naturelle et s’accorde avec celle du verset précédent. — Les gens du siècle. Cette expression est bien expliquée par Kimchi : « Ce sont les hommes dont tous les désirs et toutes les jouissances se rapportent à cette vie. » Le mot hébreu que nous rendons par siècle peut être rapproché des expressions siècle et monde que nous trouvons dans le Nouveau Testament, Lc 16.8 ; Jn 15.19; 1 Jn 2.15. — « Leur portion est dans la vie. » Le psalmiste caractérise très bien les mondains en disant qu’ils prennent pour leur portion la vie présente (bien différente est celle des fidèles, Ps 16.5) ; il reconnaît que Dieu semble même quelquefois les traiter comme ses favoris en leur accordant une large mesure de biens et de prospérité. « Or c’est là une dure tentation pour ceux qui croient que le bonheur terrestre est toujours exactement proportionné à la faveur de Dieu » (Calvin). — On sait qu’une nombreuse famille était considérée comme une bénédiction chez les Israélites. Voyez Ps 127.3, 128.3,6). D’autres traduisent : « leurs fils jouiront de l’abondance ; » mais il est probable que, si le psalmiste avait voulu exprimer cette idée, il aurait joint au mot fils le pronom possessif (leurs) qui ne se trouve pas dans l’hébreu.

Verset 15. Moi, par la justice, je contemplerai ta face, et à mon réveil je serai rassasié de ta figure!

La pensée de ce verset est bien développée par Home : « Le prophète nous enseigne par son exemple à ne pas nous affectionner aux choses d’ici-bas et à chercher tout notre bonheur dans la contemplation de Dieu. » Quelques commentateurs, comme Calvin et Hengstenberg, s’arrêtent à l’idée d’une délivrance terrestre et des consolations que le psalmiste attendait pour cette vie ; sans doute il espérait des grâces de cette nature, mais son espérance allait bien au-delà de la vie présente ; elle s’élevait jusqu’à cette communion plus parfaite avec le Seigneur dont les fidèles doivent jouir dans le ciel. C’est ce que reconnaissent les rabbins. « David, dit Tholuck, se nourrit ici de la perspective des biens du monde invisible, et, éclairé d’une manière merveilleuse par le Saint-Esprit, il parle avec une clarté qui semble ne pouvoir être donnée qu’à une âme chrétienne. » — Il y a dans ce moi qui commence le verset une énergie toute particulière. David, après avoir fait le tableau de la prospérité des mondains, s’empresse de déclarer que, quant à lui, il est bien loin de leur porter envie et qu’il connaît une meilleure part. — Les mots par la justice ont le même sens que ceux du verset 1, « écoute la justice. » David sentait qu’il ne pouvait être en communion avec Dieu dans cette vie et dans l’autre que pour autant qu’il marchait dans les voies de l’obéissance. — Je contemplerai ta face. Ces paroles s’accordent avec Ps 16.11 et avec cette promesse de notre Seigneur, promesse dont l’accomplissement commence ici-bas : « Heureux ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu. » Mt 5.8. Voyez encore 1 Jn 3.2. — Le réveil dont parle ici le psalmiste n’est pas celui qui a lieu chaque matin ; ce n’est pas non plus, comme le croit Calvin, une image de la délivrance qui a lieu pour le fidèle déjà ici-bas, lorsqu’il sort de la nuit de l’affliction ; il s’agit du réveil qui doit succéder au sommeil de la mort. L’expression se réveiller est employée en parlant de la résurrection des morts dans plusieurs passages de l’Ancien Testament. Voyez Jb 14.12 ; Es 26.19 ; Dn 12.2. — Dans les autres versions, le mot hébreu (temouna) que nous rendons par figure est rendu par les mots image ou ressemblance qui n’en reproduisent pas exactement la valeur. Le psalmiste veut dire qu’il verra Dieu lui-même et non pas seulement son image. C’est ce que l’on peut inférer d’un passage du livre des Nombres où il est question du privilège dont jouissait Moïse de « contempler la figure (temouna) de l’Éternel. » Nb 12.8. « Nous lui serons semblables, dit St-Jean, parce que nous le verrons tel qu’il est. » 1 Jn 3.2. Voyez aussi 2 Co 3.18. — Le mot rassasié, qui exprime la parfaite satisfaction de tous les besoins et de tous les désirs, rappelle Ps 16.11.

Pasteur Armand de Mestral, Commentaire sur le livre des Psaumes, p. 148-155

[1] Ce verset peut aussi se traduire : Quand l’homme agit contre la parole de tes lèvres, je me garde des voies du transgresseur.

[2] Dans l’original le premier mot du verset est un infinitif ; or en hébreu ce temps du verbe peut avoir la valeur de l’impératif et celle du passé.

[3] La traduction que nous donnons de ce verset est celle des rabbins Abenesra et Jarchi et celle d’Hengstenberg. Il y en a une autre également possible, mais moins naturelle, qui est préférée par Calvin et quelques autres : « Toi qui délivres de ceux qui se révoltent contre ta droite, ceux qui ont confiance en toi. » Nous croyons que si le psalmiste avait voulu exprimer cette idée, il aurait placé une préposition différente devant les mots ta droite (par ex. hal.)

[4] La traduction : Mes ennemis qui m’enveloppent avec acharnement peut aussi se justifier.

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