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Commentaire sur le Psaume 110

  1. Pour David. Psaume. Oracle de l’Éternel à mon Seigneur : Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que j’aie fait de tes ennemis ton marchepied ;
  2. l’Éternel enverra de Sion le sceptre de ta puissance ; domine au milieu de tes ennemis.
  3. Ton peuple s’empressera au jour de ton armement, avec une sainte parure ; du sein de l’aurore il te viendra une rosée de jeunes gens.
  4. L’Éternel l’a juré et ne se repentira point : « Tu es sacrificateur éternellement, selon l’ordre de Melchisédek. »
  1. Le Seigneur, qui est à ta droite, écrasera des rois au jour de sa colère ;
  2. il jugera les nations, remplira tout de cadavres, il écrasera une tête sur un vaste pays ;
  3. en chemin il boira au torrent, c’est pourquoi il lèvera la tête.

 

Un journal de missions raconte qu’un Hindou, ayant lu ce Psaume, était curieux de savoir qui le psalmiste appelait son Seigneur. Après avoir lu ce que dit le prophète Esaïe d’un personnage qui devait souffrir pour les péchés des hommes, il désira encore plus vivement être éclairé à ce sujet. Un jour il lui tomba entre les mains un exemplaire du symbole des apôtres, et, à la lecture du passage : il est monté au ciel et s’est assis à la droite de Dieu, il comprit immédiatement qu’il s’agissait de ce monarque mystérieux qui est le sujet du Ps 110. Ce païen montra plus d’intelligence et de droiture de cœur que les rabbins et plusieurs théologiens modernes, qui appliquent ce Psaume à David lui-même ou à quelque autre roi d’Israël. Encore faut-il ajouter que les rabbins les plus anciens (jusqu’au Xe siècle) s’accordent avec les pères de l’Église pour reconnaître ce Psaume comme messianique. Ce qui est certain, c’est que tel était aussi le sentiment des docteurs juifs du temps de notre Seigneur ; car nous les voyons admettre, sans rien répondre, l’application qu’il se fait à lui-même du premier verset du Psaume (Mt 22.41-46). En présence de ce commentaire, donné par Jésus lui-même, nous ne pouvons conserver aucun doute. Notre Psaume est encore cité dans d’autres passages du Nouveau Testament. Ac 2.34-35 ; 1 Co 15.25 ; Hé 1.13, 5.6, 7.17.

Ce Psaume a beaucoup de rapport avec les autres Psaumes prophétiques qui sont relatifs à la royauté du Messie, et dont, par conséquent, le plein accomplissement est réservé à l’avenir, comme Ps 2, 45, 72. Puisqu’il annonce la gloire qui devait suivre les souffrances du Christ (1 Pi 1.5), il est placé tout naturellement immédiatement après le Ps 109, qui se rapporte à la passion. Dans l’Église anglicane il se lit le jour de Noël. Dans l’Église catholique romaine on le chante, ainsi que les cinq suivants, chaque dimanche au service de l’après-midi (vêpres). Il nous offre, aussi bien que les psaumes du même genre dont nous venons de parler, de grandes consolations et de puissants encouragements pour un temps comme le nôtre, où les ennemis de notre Seigneur Jésus-Christ assouvissent leur haine en travaillant avec une ardeur toujours croissante à dépouiller son Église, ici de sa liberté, par les empiétements du pouvoir civil, là de ses propriétés, par des guerres impies, ailleurs encore de sa foi, par les assauts d’une théologie à la fois orgueilleuse et superficielle. Toutes ces attaques ne peuvent avoir qu’un succès momentané, et la victoire restera toujours en définitive à Celui auquel l’Éternel a dit : Assieds-toi à ma droite. C’est ce que l’histoire de l’Église, depuis dix-huit siècles, a surabondamment démontré.

Dans la première strophe le psalmiste, s’adressant au Roi-Messie lui-même, rappelle les décrets divins d’après lesquels il est en possession de la royauté suprême et d’un sacerdoce éternel (1-4) ; dans la seconde il s’adresse à Dieu et annonce les victoires du Messie (5-7).

Verset 1. Pour David. Psaume. Oracle de l’Éternel à mon Seigneur : Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que j’aie fait de tes ennemis ton marchepied ;

Le sens du mot oracle a été expliqué à l’occasion de Ps 36.2. — La place à la droite d’un monarque est la place d’honneur par excellence et implique quelquefois même la participation à son pouvoir, 1 R 2.19 ; Ps 45.10. Comparez, sur l’exaltation du Messie à la droite de Dieu, Dn 7.13 ; Ep 1.19-21. Chrysostome fait remarquer qu’en la personne de Jésus-Christ notre humanité a également été élevée, placée à la droite de Dieu. Dieu nous a fait asseoir dans les cieux célestes en Christ (Ep 3.6). — Quand tous les ennemis du Roi-Messie auront été vaincus, il continuera encore à régner, seulement son règne changera de nature ; le roi ne se présentera plus devant Dieu comme notre médiateur : c’est là ce que signifient les mots jusqu’à ce que, etc. Comparez 1 Co 15.24-28.

Verset 2. l’Éternel enverra de Sion le sceptre de ta puissance ; domine au milieu de tes ennemis.

Ce passage s’accorde avec plusieurs autres qui assignent à Jérusalem un rôle très important dans le royaume de Dieu ; Ps 2.6, 50.2, 87.2 ; Es 2.3. — Sceptre, voyez Ps 45.7. — « Le royaume du Messie aura Sion pour point de départ, mais il doit s’étendre bien au-delà. Le monde n’a pas les bras assez longs pour détrôner Jésus-Christ » (Calvin).

Verset 3. Ton peuple s’empressera au jour de ton armement, avec une sainte parure ; du sein de l’aurore il te viendra une rosée de jeunes gens.

Ce verset est assez difficile à traduire et à expliquer, principalement à cause de la concision de l’original. Il y a littéralement : Son peuple, dons volontaires, au jour de ton armement, dans une sainte parure ; du sein de l’aurore la rosée de ta jeunesse. Les Septante paraissent avoir lu le texte un peu différemment et traduisent : Avec toi est l’empire au jour de ta puissance, dans la splendeur de tes saints ; de mon sein je t’ai engendré avant l’étoile du jour. Notre traduction est celle des versions anglaise et hollandaise, de Hengstenberg, etc. Le psalmiste, après avoir parlé de la personne du Roi- Messie, en vient à indiquer les caractères du peuple qui lui appartient et au moyen duquel son royaume doit s’étendre et se défendre. — Le mot auquel nous avons donné le sens d’empressement, signifie proprement : dons volontaires, dispositions à servir ; il est très voisin de celui que nous avons rendu par bien disposé, dans Ps 51.14. — Armement signifie ici le rassemblement de l’armée. Par là le psalmiste désigne sans doute les époques de grande crise dans le royaume de Dieu et particulièrement la dernière, dans laquelle il s’agira de vaincre l’antichrist ; mais en tout temps le peuple du Seigneur doit être prêt à combattre, à confesser, à se mettre à la brèche. Rm 12.1. — La sainte parure (comp. Ps 29.2, 96.9) désigne l’uniforme que doivent porter ceux qui sont engagés dans ces saintes croisades ; ce sont les vêtements dont parle Ep 4.24. Comp. Ap 19.14. — La rosée qui naît de l’aurore (elle se montre au point du jour) paraît devoir représenter à la fois la multitude des combattants (comme dans 2 S 17.12), leur action bienfaisante (comp. Mi 5.7) et leur beauté (spirituelle) ; de même que le ciel azuré et les plantes aux mille couleurs se peignent dans chaque goutte de rosée, l’image du Dieu de gloire se reproduit dans la personne des fidèles (Col 3.10). Les soldats du Messie sont appelés jeunes gens, probablement par la même raison que la conversion est représentée comme une naissance ; comp. Ps 87.4 ; Jn 3.5 ; 1 Pi 2.2.

Verset 4. L’Éternel l’a juré et ne se repentira point : « Tu es sacrificateur éternellement, selon l’ordre de Melchisédek. »

Le prophète annonce ici que le roi dont il parle doit posséder à la fois la royauté et le sacerdoce, ce qui ne s’est accompli et ne pouvait s’accomplir ni pour David ni pour aucun de ses successeurs. L’auteur de l’épître aux Hébreux développe notre verset dans le beau passage Hé 7.1-24, où il montre comment Melchisédek a été un type de notre Seigneur, en d’autres termes, comment le Christ est sacrificateur selon l’ordre (c’est-à-dire, à la manière de, selon le mode de) de Melchisédek. Ce personnage mystérieux, dont le livre de la Genèse nous raconte la rencontre avec Abraham, qui reçut de lui une bénédiction au nom de Dieu, et qui, à son tour, lui livra la dîme de son butin (Gn 14.18-20), préfigurait le Messie, à la fois par son nom, qui signifie roi de justice, et par le nom de la ville sur laquelle il régnait (Salem, ancien nom de Jérusalem, signifie paix), mais plus encore par la position qu’il occupait, se trouvant exercer le sacerdoce au milieu d’une peuplade sémitique, distincte de la famille d’Abraham, mais qui avait conservé, à ce qu’il paraît, quelque connaissance du vrai Dieu. Ce Melchisédek, revêtu d’un sacerdoce qu’il ne tenait pas de ses pères et qui ne devait pas se transmettre à sa postérité (ce que l’épître aux Hébreux exprime en disant qu’il était sans père, ni mère, sans généalogie, sans commencement, ni fin de vie), était un type très frappant de cet autre roi-prêtre dont le sacerdoce devait être entièrement indépendant des conditions de famille, de temps et de lieu auxquelles le sacerdoce lévitique était assujetti. Quel privilège pour les croyants de posséder un sacrificateur éternel, dont la miséricorde est sans bornes aussi bien que la puissance et auquel nous pouvons recourir en tout temps et en tout lieu! Comp. Rm 8.34.

Verset 5. Le Seigneur, qui est à ta droite, écrasera des rois au jour de sa colère ;

Selon Hengstenberg et la plupart des commentateurs, le psalmiste s’adresse encore au Messie comme dans les versets précédents ; alors le Seigneur désigne l’Éternel (le Père assistant le Fils). Mais il nous paraît plus naturel de considérer ces paroles, ainsi que le font Michaëlis et les commentateurs anglais, comme adressées à l’Éternel. Ici la personne du Messie est distinguée de celle de l’Éternel. Dans d’autres passages, les auteurs sacrés font ressortir leur unité (comp. notre explication de Ps 97.7). La vérité est une, mais elle est présentée sous différents points de vue selon le but que l’auteur inspiré se propose dans tel ou tel morceau. En effet, c’est le Messie qui, au verset 1, est appelé le Seigneur, et c’est de lui qu’il est parlé à la troisième personne dans les versets qui suivent immédiatement le nôtre. Le jour de la colère est le même que le jour de l’armement. C’est le jour du jugement sur l’antichrist et ses adhérents. Ps 2.9 ; Ap 19.15-21.

Verset 6. il jugera les nations, remplira tout de cadavres, il écrasera une tête sur un vaste pays ;

Les Septante et le rabbin Kimchi traduisent : il écrasera des têtes, mais en hébreu le mot tête est au singulier, ce qui nous fait penser, comme Stier et d’autres commentateurs modernes qu’il s’agit du chef des adversaires, savoir de l’antichrist, qui se trouvera alors à la tête d’un empire considérable. Comp. Ps 68.22. — « Un sort terrible attend les ennemis du Christ. Le bon pasteur, si doux avec ses brebis, est terrible envers les loups » (Calvin).

Verset 7. en chemin il boira au torrent, c’est pourquoi il lèvera la tête.

Le sens de ce verset ne peut pas être déterminé avec une entière certitude. L’explication la plus simple nous paraît celle de Michaëlis et d’Hengstenberg, qui pensent que cette eau est l’image des forces et des consolations que le Roi-Messie reçoit d’en haut pour le mettre en état de poursuivre ses ennemis et de compléter sa victoire. Il y a peut-être allusion à un trait de l’histoire de Samson (Jg 15.18). Mais nous devons aussi mentionner l’opinion des Pères de l’Église, adoptée par Stier, qui voient, dans ce torrent, une image des afflictions et des humiliations (comp. Mt 20.28) par les quelles notre Seigneur a dû passer avant d’arriver à la gloire. Comparez Ph 2.6-10. Tel est aussi le chemin que les fidèles sont appelés à suivre : par la croix à la gloire.

Pasteur Armand de Mestral, Commentaire sur le livre des Psaumes – Tome 2, p. 211-216

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