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Commentaire sur le Psaume 4

  1. Pour le Maître-chantre ; avec instruments à cordes, Psaume pour David.
  1. Quand je crie, réponds-moi, ô Dieu de ma justice! Dans la détresse tu m’as mis au large. Aie pitié de moi et écoute ma prière.
  1. Fils des hommes, jusques à quand ma gloire sera-t-elle outragée, jusques à quand aimerez-vous une chose vaine, poursuivrez-vous un mensonge? (Sélah.)
  2. Sachez donc que l’Éternel a mis à part son adorateur : l’Éternel écoute quand je crie à lui.
  3. Tremblez et ne péchez point! Entretenez-vous sur votre couche avec votre cœur et gardez le silence. (Sélah.)
  4. Offrez des sacrifices de justice et confiez-vous en l’Éternel!
  1. Beaucoup de gens disent : Qui nous fera voir du bien? Fais lever sur nous la clarté de ta face, ô Éternel!
  2. Tu mets plus de joie en mon cœur, Que quand leur blé et leur moût abondent!
  3. En paix à la fois je me couche et m’endors, car toi, ô Éternel, toi seul, tu me fais demeurer en sûreté!

La plupart des commentateurs anciens et modernes pensent que ce Psaume fut composé comme le précédent à l’occasion de la révolte d’Absalom. On peut remarquer, en effet, des rapports assez frappants entre ces deux Psaumes. Par exemple entre le verset 6 du Psaume 3 et le dernier verset du Psaume 4. Ce court et beau Psaume est l’expression de la paix profonde que le fidèle peut goûter au milieu d’un monde corrompu et persécuteur. Les ennemis de Dieu et de ses enfants y sont aussi dépeints par des traits d’une grande vérité. Dans la première strophe, composée d’un seul verset, le psalmiste élève son cœur au Dieu dont il attend sa délivrance. Dans la seconde, il exhorte ses ennemis à renoncer à leurs projets impies et à rentrer en eux-mêmes. La troisième est un beau témoignage de la paix qui lui était accordée au milieu des plus grands dangers.

Verset 1. Pour le Maître-chantre ; avec instruments à cordes, Psaume pour David.

Au maître-chantre, avec les instruments à cordes, Psaume pour David. En tête du titre de ce Psaume et de cinquante-deux autres titres, se trouve un mot hébreu (lamenatseak) qui, suivant Kimchi et d’autres rabbins et la plupart des commentateurs modernes, signifie : Au maître-chantre, c’est-à-dire, remis au personnage qui avait la direction de la musique sacrée (Voyez Introduction, Chap. I). Ce mot hébreu se compose d’une préposition et d’un mot qui est considéré par ceux que nous venons de nommer comme un substantif qui désignait la charge d’inspecteur, directeur ; il a ce sens dans 2 Chr 2.2, 18, 34.13. D’autres y voient un verbe, qui signifie : chanter, chanter avec une voix éclatante. La version chaldéenne suit cette dernière opinion et traduit : pour louer. Ce même verbe paraît aussi avoir signifié : achever, consommer, remporter la victoire, ce qui explique pourquoi les Septante ont pu rendre le mot dont nous nous occupons par : pour la fin, ce qui pouvait signifier que ces Psaumes devaient être en usage constamment, ou bien qu’ils devaient se chanter d’un bout à l’autre sur la même mélodie. Nous nous en tiendrons à la traduction ordinaire et nous considérerons les mots : au maître-chantre comme indiquant que les Psaumes en tête desquels ils se trouvent, avaient été destinés d’une façon particulière au culte public. — Le titre de ce Psaume indique aussi avec quelle espèce d’instruments il devait être accompagné.

Les instruments qui dans les titres des Psaumes sont désignés sous le nom général d’instruments à cordes (en hébreu : neguinot), sont au nombre de deux : la guitare (en hébr. : kinor), sur laquelle David lui-même excellait (1 S 16.23) et que nos versions françaises traduisent incorrectement par violon ; et la harpe (en hébr. : nebel), qui était chez les Hébreux un instrument à dix cordes qui avait la forme d’un triangle renversé.

Verset 2. Quand je crie, réponds-moi, ô Dieu de ma justice! Dans la détresse tu m’as mis au large. Aie pitié de moi et écoute ma prière.

Le psalmiste appelle l’Éternel Dieu de sa justice, parce qu’il avait pleine confiance au gouvernement de Dieu qui rend à chacun selon ses œuvres, et qui ne pouvait manquer de manifester tôt ou tard l’innocence de son serviteur en face de ceux qui le calomniaient et le persécutaient. « Rien n’est plus amer que d’être condamné injustement. C’est cependant ce qui arrive aussi aux saints tous les jours, et il leur est bon d’être ainsi éprouvés, afin que se détournant de toutes les séductions du monde, ils ne comptent que sur Dieu seul » (Calvin). Nous avons vu comment David pouvait parler de sa justice sans présomption. (Voyez Introduction, Chap. VI).

Dans le second membre du verset, le verbe est au passé, soit parce que David fortifie sa foi par le souvenir de délivrances précédentes, soit, ce qui nous paraît plus probable, parce qu’il était tellement assuré d’être exaucé qu’il regardait sa délivrance comme un fait déjà accompli. C’est le passé avec la valeur du futur (passé prophétique) qui se rencontre fréquemment dans les livres prophétiques. — Être à l’étroit, être au large, sont des locutions qui représentent le bonheur ou le malheur. Les Arabes disent aussi d’un homme : Sa terre lui est étroite ou large. — En terminant cette invocation, le psalmiste saisi du sentiment de sa misère, s’écrie : Aie pitié de moi! « Toutes les fois que nous demandons quelque chose à Dieu, nous devons aussi commencer par nous recommander à sa bonté gratuite » (Calvin).

Verset 3. Fils des hommes, jusques à quand ma gloire sera-t-elle outragée, jusques à quand aimerez-vous une chose vaine, poursuivrez-vous un mensonge? (Sélah.)

Le psalmiste, calmé et fortifié par la prière qu’il vient d’adresser à Dieu, invite ses adversaires d’une manière pressante à rentrer en eux-mêmes et à se désister de leur entreprise criminelle qui ne pouvait avoir aucun succès, puisqu’ils se trouvaient faire la guerre à Dieu lui-même. Cette même pensée est développée dans le Psaume 2. La plupart des commentateurs pensent que l’expression : Fils des hommes, a une force particulière dans ce passage, ainsi que dans plusieurs autres (1 S 26.15 ; Ps 49.3, 62.10), et qu’elle désigne les hommes de haut rang, les grands de la nation. — Il est probable qu’en parlant de sa gloire, qui était l’objet des outrages des méchants, David pensait à la dignité royale.

Verset 4. Sachez donc que l’Éternel a mis à part son adorateur : l’Éternel écoute quand je crie à lui.

Ce verset explique pourquoi les projets des méchants sont une chose vaine, un mensonge. David était convaincu qu’il n’était pas monté sur le trône par l’effet d’un aveugle hasard ou du caprice de ses sujets, mais par la volonté de Dieu, et cette pensée le remplissait de paix et de confiance au milieu des plus grands périls. Le chrétien peut tenir un langage semblable quand il est assuré que c’est de Dieu qu’il tient ses charges, sa fortune, sa noblesse, sa position sociale. Mais des princes ou des magistrats qui sont arrivés au pouvoir par une usurpation ou une révolution et qui n’ont pas la conscience pure ne peuvent pas éprouver la même confiance.

Nous avons rendu par adorateur dans ce passage et dans la plupart de ceux où il se rencontre un mot hébreu (kasid) que les anciennes versions traduisent : saint, et les modernes : pieux, bon, bien-aimé. Il se rattache à un mot très connu (késed) qui signifie : amour, grâce, bonté, et s’emploie pour désigner les vrais fidèles, les hommes qui aiment Dieu et qui le servent avec sincérité. Le terme adorateur nous a paru convenir dans la plupart des cas pour rendre cette idée par un seul mot, et nous avons préféré réserver saint pour rendre un autre mot (kadoche) aussi très fréquent dans l’Ancien-Testament. Ajoutons que cette belle expression : kasid, adorateur, ne convient dans son sens absolu, dans sa plénitude, à aucun enfant d’Adam, et qu’elle est appliquée au Messie dans Ps 16.10. Aussi dans notre Psaume, aussi bien que dans le précédent (voyez l’introduction au Psaume 3) et les suivants, nous devons toujours voir à la fois David et le Messie. C’est une observation que nous nous dispenserons de répéter, mais dont le lecteur voudra bien se souvenir.

Verset 5. Tremblez et ne péchez point! Entretenez-vous sur votre couche avec votre cœur et gardez le silence. (Sélah.)

Nous avons conservé au mot de l’orignal qui commence ce verset son sens le plus ordinaire, et nous pensons, avec la plupart des commentateurs, qu’il s’agit ici particulièrement de la crainte qui saisit le pécheur lorsque sa conscience se réveille et qu’il pense au jugement de Dieu et à l’éternité. Le psalmiste dit : Tremblez et ne péchez point, parce que ce salutaire tremblement est le premier arrêt dans la voie du péché. Les Septante et quelques autres versions ont traduit : Mettez-vous en colère et ne péchez point, et St-Paul, dans l’allusion qu’il fait à ce passage (Ep 4.26), a suivi la version qui était en usage de son temps (voyez l’explication pour cet usage dans Ps 2.9). Le verbe dont il s’agit paraît avoir eu cette signification dans quelques passages ; si l’on adopte cette traduction, le psalmiste aurait voulu dire : Continuer à être en colère et à vous soulever contre l’Éternel, serait de votre part un péché : mais le premier sens que nous avons indiqué, est plus probable. — Entretenez-vous avec votre cœur : il est absolument nécessaire que le pécheur s’arrache au bruit du monde et aux vains discours des hommes pour se placer en face de son propre cœur. Nous avons beaucoup de choses à dire à nos cœurs. C’est sur notre couche, pendant le silence des nuits et en général dans la solitude, que nous sommes le plus disposés à faire le compte de nos voies et à écouter les appels du Seigneur. David recommande ce qu’il pratiquait lui-même (Ps 63.7). Une fois que le pécheur s’est recueilli devant Dieu, il cesse aussi de s’agiter et de faire entendre sa voix au-dehors, il garde le silence.

Verset 6. Offrez des sacrifices de justice et confiez-vous en l’Éternel!

Ce verset est séparé du précédent par le mot sélah (voyez Ps 3.3), et cette circonstance suggère à St-Augustin une idée ingénieuse : « Il est possible que cette pause doive indiquer le passage de la vie ancienne à la nouvelle ; une fois que par la repentance, le vieil homme est détruit ou affaibli, l’homme régénéré et nouveau peut offrir à Dieu des sacrifices de justice. » Le psalmiste appelle sacrifices de justice, le culte qui procède d’un cœur pur et qui est accompagné d’œuvres agréables à Dieu, pour les distinguer des sacrifices des hypocrites, tels qu’étaient ceux qu’Absalom offrait à Hébron au moment où il levait l’étendard de la révolte (2 S 15.7, 12). C’est au cœur que Dieu a égard et non pas aux actes extérieurs du culte : sacrifices, assemblées religieuses, communions, etc. (Voyez Ps 50.8, 23, 51.19, 21 ; 1 S 15.22 ; Os 6.6). Si le chrétien veut offrir à Dieu des sacrifices de justice, il faut qu’il regarde à Jésus-Christ, qui lui a été fait justice (1 Co 1.30), et qu’il consacre ses membres à Dieu, pour être des instruments de justice (Rm 6.13). Ceux-là seuls qui ont cette vraie piété, ont le droit de se confier en l’Éternel.

Verset 7. Beaucoup de gens disent : Qui nous fera voir du bien? Fais lever sur nous la clarté de ta face, ô Éternel!

Qui nous fera voir du bien? C’est là le langage non seulement des ennemis personnels de David, mais de tous les mondains, de tous ceux qui n’ont pas tourné leur cœur vers Dieu. « David compare le désir unique dont il était consumé avec les désirs divers qui emportent les mondains, tantôt d’un côté, tantôt de l’autre » (Calvin). C’est ainsi que le premier membre du verset 7 est expliqué déjà par les rabbins, et cette explication nous paraît s’accorder mieux avec le contexte que celle de quelques commentateurs modernes, qui voient dans ces paroles l’expression des craintes et du découragement des amis de David. — En demandant à Dieu de faire lever sur lui (et sur ses amis fidèles) la clarté de sa face, David reconnaît que c’est en Dieu seul que l’on doit chercher le bonheur. Dieu nous montre sa face quand il nous bénit et qu’il nous exauce ; il nous la cache (Ps 10.11), quand il nous donne des signes de son déplaisir. Il est probable que David, en choisissant cette expression, pensait à la bénédiction solennelle qui était en usage pour le peuple d’Israël depuis le temps de Moïse et qui se répète encore dans nos Églises à la fin du service divin (Nb 6.24-26).

Verset 8. Tu mets plus de joie en mon cœur, Que quand leur blé et leur moût abondent!

Cette joie, que le psalmiste estime bien supérieure à celle que peuvent donner les richesses du monde, est celle dont parle St-Paul (Ph 4.4). Le fidèle a bien raison de se dire plus heureux que les gens du monde, car ceux qui « dédaignant la grâce de Dieu se plongent dans les délices ne sont cependant jamais satisfaits » (Calvin). — Hengstenberg fait remarquer que, tandis qu’Absalom et son parti se trouvaient probablement dans l’abondance, David était réduit à vivre des provisions qu’on lui apportait (2 S 16.1), néanmoins son âme était contente, elle était nourrie du pain du Ciel. (Jean 6.33).

Verset 9. En paix à la fois je me couche et m’endors, car toi, ô Éternel, toi seul, tu me fais demeurer en sûreté!

« Il déclare qu’il se sent aussi en sûreté que s’il était entouré de tous les remparts du monde » (Calvin). Voyez Ps 3.6.

Pasteur Armand de Mestral, Commentaire sur le livre des Psaumes, p.71-77

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